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Insertion professionnelle, Recherche
le 4 octobre 2017
A l’occasion de ma thèse, j’avais envie de revenir sur la notion d’exposition des odeurs. Comment parvient-on à « montrer » quelque chose d’invisible ?
A l’origine, je suis un profil littéraire. J’ai commencé par un bac L avec une dominante Arts plastiques à Bordeaux. Entrée à l’université, j’avais envie de tout faire ! J’ai continué avec une double licence en Lettres & Arts et Métiers de l’écrit (Paris Diderot) qui m’a orientée vers la critique d’art. Puis un master Esthétique, Art et Cultures (Paris Panthéon Sorbonne) réalisé en parallèle d’un master Muséologie et nouveaux médias à la Sorbonne Nouvelle. Je suis restée à la Sorbonne Nouvelle par la suite, j’y enseigne un peu, et j’y réalise une thèse en Esthétique et Sciences de l’Art – Muséologie sous la direction de François Mairesse. Dans ce cadre je bénéficie d’une convention CIFRE avec la Maison Cartier. J’entame actuellement ma troisième année de recherche et espère pouvoir soutenir l’année prochaine !
En parallèle de mes études, je suis rédactrice pour la revue CRITIQUE D’ART qui est basée à Rennes. J’écris pour eux depuis environ cinq ans et je me suis rendue compte qu’il était protocolaire, lorsqu’on écrit une critique d’œuvre, de commencer par une description visuelle de l’objet, de l’installation ou de la performance. C’est répétitif et rébarbatif. J’ai donc commencé à m’interroger sur « l’existence » d’un art qui pourrait être analysé et critiqué sans nécessité de le décrire visuellement. J’ai beaucoup cherché, mais c’est finalement un choc émotionnel qui m’a mise sur la piste des odeurs. N’étant pas chimiste, j’ai exploré la dimension olfactive par le biais de ce que je connaissais, les théories de l’art et la muséologie. Au fil de mes masters, j’ai investi les notions de médiation et de patrimoine olfactifs, sujets respectifs de mes mémoires (La Médiation olfactive : Maturation heuresthésique pour une éloquence expérientielle / Le Patrimoine olfactif : Un effet placebo à l'appréhension de la perte.) A l’occasion de ma thèse, j’avais envie de revenir sur la notion d’exposition des odeurs. Comment parvient-on à « montrer » quelque chose d’invisible ? J’ai réalisé que de plus en plus d’œuvres d’art ou de propositions de marketing sensoriel investissaient le champ odorant, mais en procédant souvent par l’ajout d’effluves naturelles ou de synthèse à un contexte donné. Cet aspect « valeur ajoutée » de l’odeur m’a posé problème.
Ma recherche s’intitule donc « Pour une expertise olfactive muséale : de la documentation des collections aux dispositifs expographiques » et s’intéresse à la dimension odorante comme caractéristique intrinsèque aux musées et à leurs collections.
Chaque financement de thèse est particulier. J’ai réalisé ma première année de recherche en bénéficiant d’un contrat doctoral, subvention à laquelle j’ai successivement renoncée lorsqu’il m’a été possible de signer avec Cartier. Les conventions CIFRE ont pour caractéristique de lâcher de plain-pied les doctorants dans le secteur de l’entreprise. L’adaptation n’est pas toujours évidente quand on a un profil universitaire, a fortiori quand on est encore à l’université ! Mais c’est une expérience incroyable sur le long terme.
Au quotidien, je travaille auprès du parfumeur Mathilde Laurent, au laboratoire qui se trouve à la Fondation Cartier. C’est un cadre unique et exceptionnel pour des recherches alliant l’olfaction à la muséologie ! J’y suis la plupart du temps pour assurer le suivi des projets auxquels je suis affectée, et organise mon temps sur place pour avancer en parallèle sur ma thèse. Il m’arrive de m’absenter ponctuellement pour aller donner cours ou assister à un colloque, mais en principe je suis toujours à la Fondation.
Les bénéfices sont multiples et variés. Durant l’année de mon contrat doctoral, j’ai beaucoup souffert de l’isolement de la thèse. Etre au quotidien dans une entreprise me permet de donner de la vie à mon travail, d’appliquer concrètement mes recherches dans des projets, parfois même d’être sollicitée par des collègues pour porter un regard différent sur certaines problématiques. La CIFRE me permet de donner du sens à mes recherches, de me projeter raisonnablement sur ce qu’il m’est possible de faire grâce à elles, de réorienter en temps réel si nécessaire et surtout d’alimenter au fur et à mesure avec du concret. Il m’est devenu essentiel d’associer la théorie à la pratique.
Je préfère parler d’envies ! Même si je suis du genre à naviguer à vue, je pense m’orienter vers le poste de curateur d’art olfactif au terme de ma thèse. A ma connaissance il n’existe pas encore en France, mais cela me permettrait de regrouper toutes les casquettes que je me suis plu à développer au fil de mes études. J’aimerais lancer une chaîne YouTube sur les rapports entre art et odeurs, prendre le temps de publier mon travail, m’investir dans de beaux projets et surtout, continuer de voir s’épanouir les possibles de l’olfaction dans le champ artistique et culturel, en espérant pouvoir apporter ma petite pierre à l’édifice.
Contactez Mathilde via Linkedin
mise à jour le 28 mars 2019