Biologistes, anthropologues et historiens admettent aujourd’hui que la théorie des races est une fabrication idéologique et politique qui a permis aux empires coloniaux de justifier leurs ascendants sur les peuples dominés, exploités, esclavagisés, mais aussi d’affirmer la nécessité d’exporter et d’imposer, au nom de ce que l’on a appelé LA civilisation, la vision du monde occidentale et l’ordre des races définies comme supérieures. Or, si la théorie des races a été anéantie, l’idée de race et son cortège de préjugés n’ont pas quitté les imaginaires. La représentation de la race reste un enjeu des arts du spectacle et des médias. Exhiber la race de l’Autre en jouant sur la couleur de peau est une pratique issue de la pensée coloniale, et penser la race en terme d’apparaître, de stéréotypes et de face barbouillée, c’est d’abord penser une hiérarchie chromatique. Même si le charbonnage de la face ne relève pas de la dérision, voire d’intentions racistes, il reste perçu comme un geste réducteur et offensant qui demeure un héritage colonial. C’est pourquoi, il est nécessaire de dé-jouer les gestes de blackface et d'apprendre à dé-penser la race, d’en épuiser les imageries, d’en ruiner les fondements, d’en débusquer les stéréotypes. Ce séminaire propose de revenir sur les controverses liées au blackface qui ont récemment agité la scène théâtrale, comme la scène médiatique et le cinéma, en envisageant l’histoire du grimage sur le Vieux Continent, des fêtes de cour au carnaval en passant par le vaudeville et la figure d’Othello, puis le déploiement des Menstrels show aux Etats-Unis et les enjeux politiques et sociétaux qui lui sont attachés, sans oublier en quoi l’histoire du blackface est intimement liée à la naissance du jazz.