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du 28 novembre 2013 au 29 novembre 2013
Laboratoire DIPRALANG – EA739, Université de Montpellier 3
avec la participation et le soutien de l’IUF, de l’Université de Paris (UMR 7018)
et du Labex EFL (7EM2)
1. Minorités cachées
L’invisibilité de ces groupes s’est-elle imposée comme un fait naturel, par inertie, ou résulte-t-elle au contraire d’une stratégie de survie ? En ce cas, s’il s’agit d’un processus actif, dans quelle mesure cette démarche est-elle fondée sur une conscience collective d’une situation historique dans la relation du groupe minoritaire au groupe majoritaire ou aux groupes environnants ? Quels sont les facteurs qui motivent cette dissimulation ou cette discrétion ? Dans quelle mesure relèvent-t-elles de ce qu’Erving Goffman en son temps décrivait comme la culture du stigmate (dissimulation), ou de l’intention de préserver un équilibre (discrétion). Il s’agit là d’une question d’intelligence sociale collective, – facteur certes difficile à cerner –, tout comme Maurice Halbwachs parlait de mémoire collective. Cette question est d’un grand intérêt sur le plan épistémologique, puisqu’elle relève d’une conscience collective et de formes d’auto-organisation adaptative. Quels sont alors les enjeux mais aussi les techniques et les procédés mis en œuvre collectivement pour garantir un équilibre intergroupe ? Dans quelle mesure de tels équilibres sont-ils solides ou fragiles ? Une réflexion analogue a eu lieu dans les Balkans autour des minorités cachées (cf. B. Sikimić (éd.), 2004, Hidden Minorities in the Balkans, Belgrade, Institut de balkanologie). L’objectif de ce colloque est d’élargir aussi bien le champ empirique que le questionnement épistémologique.
2. Minorités enclavées
Un processus important de ces dynamiques de retrait apparent de groupes sociaux de la scène glottopolitique est l’enclavement, qui peut être la conséquence de changements dans le tracé des frontières, de transplantation ou de déplacement de populations pour des raisons géostratégiques ou socioéconomiques. Il peut en résulter des retournements de situation ou des inversions de rôle en termes de relations majorité-minorités, dont les mécanismes et les effets revêtent un grand intérêt sur le plan épistémologique, puisque ces changements montrent bien qu’aucune position, dominante ou dominée, n’est par définition donnée par essence : l’asymétrie de pouvoir est le résultat d’une construction historique. Comment évoluent les relations intergroupes entre l’enclave et son environnement dans l’espace et dans le temps ? Si l’enclave est une « tête de pont » d’un arrière-pays plus vaste ou puissant, quelles relations entretiennent cette « périphérie » qu’est l’enclave et le « centre » qu’est la métropole ? Le « centre » de référence peut instrumentaliser l’enclave, qui lui semble relever de sa « sphère d’influence », mais celle-ci peut aussi s’individuer en dépit de toute relation tangible, et se déclarer d’une essence séparée.
Tous ces cas de figure sont riches d’enseignements sur l’un des grands apports de la sociolinguistique aux sciences humaines : non seulement elle explore et fait apparaître des mondes glottopolitiques, mais elle permet d’observer dans quelle mesure des groupes socioculturels peuvent coexister ou entremêler leur existence dans de multiples dimensions qui leur sont propres. Les contradictions des politiques linguistiques naissent souvent de cette incapacité à cerner les enjeux concernant les relations intergroupes qui traversent non pas seulement le temps et l’espace du politique, mais de multiples dimensions de la subjectivité, du point de vue psychosocial.
mise à jour le 8 octobre 2013