Cette journée d’étude propose d’investir des objets peu explorés en sociolinguistique, à savoir le silence et le bruit, que nous considérerons ici comme un son « out of place »1 (Hendy 2013: viii), non-désiré ou non rationnel. Il s’agira de questionner ce qui pourrait par ailleurs être considéré comme du bruit, exclu donc du domaine de la production du sens. Cette journée se veut interdisciplinaire et innovante à plusieurs égards : elle fera intervenir des spécialistes de divers disciplines (sociolinguistique, anthropologie, études artistiques) mais aussi de terrains très différents allant des questions migratoires aux rapports humains-non humains. Il s’agit de créer les conditions d’un dialogue entre des chercheur·es travaillant ce qui relève de la production du sens au-delà de la seule voix humaine pour tenter de redéfinir certains des objets de la sociolinguistique.

Notre réflexion s’inscrit dans des débats récents autour de l’« occularcentricity » (Porcello et al. 2010; Samuels et al. 2010) de la recherche en sciences sociales. Si les travaux pionniers de Raymond Murray Schafer (1977) ont motivé des recherches sur des phénomènes acoustiques ou encore sur des méthodes quantitatives pour étudier le son (Pinch & Bijsterveld 2012; Féraud 2013), le développement d’une anthropologie sonore (Féraud, 2010; Guillebaud, 2017) a permis de porter un plus grand intérêt pour des objets nonvisuels : la voix, les sons ou le silence, et de leur rôle dans des processus sociaux. Toutefois, l’aspect sociolinguistique de ces objets reste peu questionné. En quoi peuvent-ils être considérés comme des objets aussi sonores que langagiers, régis par des normes sociolinguistiques ? Les communications s’inscrivent dans trois axes distincts mais complémentaires : sons et migrations, voix et silence, au-delà de l’humain.