Présentation
Résumé du projet en français
UN RESEAU DE RECHERCHE INTERNATIONAL Fondé sur un partenariat entre le CRAL (Centre de recherches sur les arts et le langage, CNRS/EHESS) et l'EA « Écritures de la modernité » (conventionnée CNRS, université Paris 3), le projet Animots (2010-2014), constitué de huit chercheurs, vise à pallier le manque d'une recherche organisée à moyen et long terme sur les animaux et l'animalité dans la littérature de langue française des XXe-XXIe siècles. L'appartenance de trois chercheurs à des établissements britanniques et américains permettra de tenir compte des renouvellements théoriques anglo-saxons et de développer la recherche en anglais et en français. Un séminaire pluridisciplinaire, un séminaire de recherche doctorale, deux journées d'étude, deux colloques, un congrès international et dix publications collectives conduiront à l'actualisation des réflexions en France, aux États-Unis et au Royaume Uni. ACTUALITE DE LA QUESTION DE L'ANIMALITE : UN CARREFOUR DE DISCIPLINES Les bouleversements historiques propres aux XXe-XXIe siècles ont engendré une intense activité intellectuelle sur la question de l'animal : du grand bond en avant darwinien et mendélien jusqu'aux pandémies les plus actuelles, en passant par la réification du vivant, l'extinction massive d'espèces ou les xénogreffes, la coupure anthropozoologique se trouve tantôt dramatiquement accentuée, tantôt remise en cause. De la philosophie à la biologie, en passant, pour ne citer que quelques disciplines, par le cognitivisme, l'histoire ou les sciences politiques, l'animal est envisagé comme un objet d'étude incontournable, provoquant des reconfigurations majeures du champ de la recherche : disparition de l'histoire naturelle, développement de l'écologie, de l'éthologie, de l'éthique... Dans ce concert intellectuel, les discours et représentations propres à la création littéraire sont rarement pris en compte par une critique académique qui aborde l'animalité selon des axes traditionnels restrictifs (analyses allégoriques ou symbolistes, études régionalistes, cantonnement à certains genres dits mineurs). Or depuis le début du XXe siècle, les écrivains sont légion à inscrire leur production dans les enjeux sociaux et épistémologiques les plus contemporains : il devient donc crucial de légitimer la question de l'animalité en études littéraires et de renouveler celles-ci par l'établissement de transversales avec d'autres disciplines. UN SUJET EMERGENT EN ETUDES LITTERAIRES L'animal, si « naturel » au niveau phénoménologique et existentiel, est en réalité un objet d'étude fuyant et démultiplié, construit par les chercheurs autant qu'étudiés par eux : le pluriel de l'acronyme du projet, tiré d'un néologisme créé par J. Derrida, vise à mettre en exergue le caractère réducteur du mot « animal », supposé rassembler des rapports au monde diversifiés, voire incomparables. L'acronyme rappelle en outre que la recherche se fera sur le terrain du langage critique et créatif : un travail définitionnel sera opéré sur des notions proches (« bête », « animal », « bestialité », « humanité »...) ainsi qu'une réflexion sur les inconvénients et les apports de l'anthropomorphisme. On examinera quels procédés narratologiques et stylistiques peuvent rendre compte de modes d'être réputés inaccessibles à l'humain (von Uexküll), et, au niveau cognitif, si des émotions comme la projection et l'empathie, souvent propres à la démarche scripturale, sont à même de donner accès à une altérité spécique. L'inscription des textes dans leur contexte scientifique de même qu'une reconfiguration de l'histoire littéraire seront mis en oeuvre à partir de la problématique de l'animalité. Si l'animal, dont Moby Dick est le paradigme, s'avère un point de fuite pour la littérature (J.-C. Bailly), poésie et fiction, par la figuralité, n'en parlent pas moins de l'animal et pour l'animal (G. Deleuze), et apportent un savoir spécifique sur le vivant, et non pas seulement une représentation de celui-ci.
Résumé du projet en anglais
AN INTERNATIONAL RESEARCH NETWORK Created in partnership with the CRAL (CNRS/EHESS) and Research unit Écritures de la modernité (U. of Paris 3/CNRS), and including eight researchers, the Animots project (2010-2014) aims at widening a still vastly unexplored field of research, in the medium or long run, on animals and animality in 20th- and 21st-century French and Francophone Literature. Three members of the research team affiliated with American and British universities will follow theoretical developments in the English-speaking world and assess and help set up international projects in English and in French. An interdisciplinary seminar, a doctoral research seminar, two one-day conferences, two colloquia, an international convention and ten collaborative publications will set forth the latest reflection on the topic in France, the United States and the United Kingdom. NOVELTY VALUE OF THE QUESTION ON ANIMALITY: A DISCOURSE ACROSS THE DISCIPLINES Historical events, in the 20th and 21st century, have given rise to an intense intellectual energy around the question of the animal: from Darwin's and Mendel's huge scientific discoveries to contemporary pandemics, from the mechanization of living beings (including human beings) to massive extinction of certain species or the practice of xenografting, the frontiers of anthropozoology have been either dramatically reinforced or fully challenged. From philosophy to biology, from cognitive sciences to history or political science, to name but a few, the animal has become a fundamental research subject. It has led to new and major configurations in many fields of research: the disappearance of natural history, the development of ecology, ethology and ethics... In this intellectual chorus, literary discourse and representation are seldom considered by an academic criticism whose views on animality are limited to traditional approaches (allegorical analysis, regional studies, limitation to minor genres). However, since the beginning of the 20th century numerous writers have been interested in sharing contemporary social and epistemological reflections. Therefore, it is now crucial to legitimize the research on animality in literary studies and to renew scholarly research by inviting other disciplines into the field. ANIMALITY, AN EMERGING TOPIC IN LITERARY STUDIES The animal, so natural at the phenomenological and existential level, is in fact a flexible and multiple topic of research, one constructed and analyzed by the researchers themselves: inspired by a neologism created by Jacques Derrida, the plural form of the project title aims at marginalizing the reductive character of the singular form, animal, which, as such, presupposes the conglomeration of all instances of a world which is, at all events, composed of diversified and unique yet multiple forms. Animots seeks to develop a research that will be done at a critical as well as at a creative level: we will work at precisely defining related concepts such as beast, animal, bestiality, humanity, as well as offering a reflection on the pluses and minuses of anthropomorphism. We will analyze which narrative and stylistic strategies may best highlight new modalities that up to now have remained closed to the study of the human (von Uexküll), and, at the cognitive level, see if emotions like projection and empathy, often part of the writing process, may offer access to a specific kind of otherness. Through the problematic of animality, we will be able to inscribe texts in their scientific context while simultaneously reconfiguring literary history. If the animal, of which Moby Dick might be the quintessential paradigm, constitutes the vanishing point of literature (J.-C. Bailly), poetry and fiction, by ways of figures and figuration, nevertheless speak of and for the animal (G. Deleuze), and thus convey a specific knowledge of the living that goes beyond the mere representation of its forms.