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Zola et Tolstoï

le 18 octobre 2013

 

Journée d’étude


Lieu : École normale supérieure, salle des Actes, 45 rue d’Ulm, Paris 5e
Organisateurs : Alain Pagès, Sophie Guermès, Clélia Anfray.
EA 3423 - Centre de recherche sur les poétiques du XIXe siècle (CRP 19)

Présentation :

Les lecteurs ont souvent comparé – et le plus souvent pour les rapprocher – les œuvres comme les figures de Zola et de Tolstoï. La critique littéraire quant à elle s’est rarement emparée du sujet, à l’exception notable de Lukács, opposant le réalisme de Tolstoï, qu’il admirait, au naturalisme de Zola, déprécié (Raconter ou décrire ?, 1936, repris dans Problèmes du réalisme, L’Arche, 1975). Henri Guillemin s’est intéressé à l’un et à l’autre sans toutefois les analyser ensemble. Pourtant, ces deux écrivains contemporains l’un de l’autre partagent de nombreux points de convergence : des méthodes de travail minutieuses (constitution de dossiers préparatoires pour l’un, nombreuses variantes dans les manuscrits avant le choix définitif pour l’autre – on emploie aussi le mot « dossier » pour la genèse des romans de Tolstoï – , pour les deux, enquêtes documentaires et sollicitation de renseignements), des thématiques communes – de la guerre aux travers de la vie conjugale en passant par les chemins de fer (voir Nina Lee Bond, Tolstoy and Zola : Trains and Missed Connections, PhD Dissertation, Columbia University, 2011) – mais aussi une conception assez proche du rapport de la littérature à la vérité ou encore une préoccupation tardive mais décisive pour un christianisme relu dans une perspective essentiellement morale ou sociale, et pour la question de l’éducation.

Certains de leurs contemporains ne s’y étaient pas trompés. L’écrivain naturaliste allemand Arno Holz les réunit, en 1895, dans un même mouvement poétique : « Zola, Ibsen, Léon Tolstoï, / un monde réside dans ces mots, / un monde qui n’est pas encore pourri, / un monde qui reste profondément sain ! » (« Zola, Ibsen, Leo Tolstoi, /Eine Welt liegt in den Worten, /Eine, die noch nicht verfault, /Eine, die noch kerngesund ist », Die Kunst. Ihr Wesen und ihre Gezetze, 1891). Et Anatole France, à l’occasion des obsèques de Zola, parle d’une œuvre qui n’a de « comparable en grandeur [que celle] de Tolstoï », tout en concédant que leurs cités idéales, toutes deux généreuses et pacifiques, se distinguent l’une de l’autre de façon notable : « Celle de Tolstoï est la cité de la résignation. Celle de Zola est la cité du travail ».  

Si le traducteur Halpérine-Kaminsky a, en vain, consacré tous ses efforts à la rencontre entre les deux hommes, Tolstoï, malgré l’estime qu’il portait à Zola (il a salué son acte courageux en faveur de Dreyfus, « contre l’antisémitisme et le chauvinisme »), s’est montré réticent à l’égard de la foi de Zola dans le travail et la science (Le Non-agir, 1893), mais aussi de l’hérédité, tournée en dérision dans un passage de Résurrection ; il avait en outre rejeté, à partir de la crise existentielle traversée au tournant des années 1880, toute littérature dont le but ne lui paraissait pas moral. Zola de son côté, qui défendait la moralité de ses propres romans, a dit sa profonde admiration pour le créateur de Guerre et paix et d’Anna Karénine, mais aussi, à deux reprises, son aversion pour La Sonate à Kreuzer (The New York Herald, 24 août 1890 ; puis La Revue blanche, 1er mars 1902), et son scepticisme à l’égard de ce « noble […] rêveur […] assoiffé […] de justice » auquel il reprochait de ne pas indiquer les voies pour parvenir à « l’universel bonheur » (lettre-préface pour L’Argent et le travail, de Tolstoï, trad. Halpérine Kaminsky, 4 novembre 1891). Lui-même tentera peu après de résoudre cette question en écrivant ses Évangiles.

L’objet de cette journée consistera à creuser davantage les différentes perspectives de ce dialogue avorté.

Type :
Colloque / Journée d'étude

mise à jour le 25 septembre 2013


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