Axes
La question de l'écriture, de la parole et de l'espace public en Amérique latine se pose dans un premier temps dans le sens le plus concret: celui qui invite à l'exploration de l'espace de la cité, de ses rues et de ses places, des monuments qui en scandent la mémoire ou des lieux consacrés aux débats ou à la prise de parole devant un auditoire. Inscriptions légales ou illégales, graffiti, affiches, paroles autorisées ou bravant la censure, la cité est, pour reprendre les mots de Régis Debray (
Cours de médiologie générale, 1991), une logosphère autant qu'une graphosphère, qui s'offre à l'écoute et à la lecture, un espace qui, pour Marcel Freydefont, "entrelace aux formes spatiales des formes sociales".
Une telle approche encourage sans doute à ouvrir le champ définitionnel de l'espace public: en tant qu’espace de sociabilité, celui-ci ne saurait être circonscrit à une spatialité purement physique. L'espace public est aussi un espace où symboles et discours s’entremêlent ; un espace du consensus ou du dissensus (Habermas) dans une dimension clairement politique. Si ces discours se manifestent en premier lieu dans l’espace de l’agora, c’est-à-dire, celui de la cité, ils ne sont pas pour autant absents des espaces virtuels, d’où l’intérêt de les considérer ensemble, par exemple à partir du sens que Michel Lussault donnait récemment à la catégorie d'hyper-lieux (
Hyper-lieux. Les nouvelles géographies de la mondialisation, 2017).
Ce colloque international, le XVI du CRICCAL, veut, autour de la question de l’espace public, rassembler des approches aussi bien littéraires que civilisationnistes, anthropologiques ou historiques, afin de saisir au mieux les dynamiques et les flux qui font de cet espace un objet d’étude complexe et une source d’interrogations multiples.
Axes :
- a) la parole créative dans l’espace public
- Matérialité des supports et dispositifs d’inscription publique ; types d'inscription et fonctions : panneaux, codes visuels, écritures manuscrites, écritures funéraires, plaques, inscriptions « sauvages »…
- Inscription des mots dans l’espace public à proprement parler : graffiti, affiches poétiques, poésie murale, poésie sonore, revues murales, programmes de poésie dans les transports en commun, etc.
- b) la parole politique dans l’espace public
- Tribuns et orateurs. Populismes contemporains et l’espace de l’agora. Du balcon à la place / à l’écran. Tension entre oralité et écriture dans l’arène politique : programmes politiques, manifestes, discours…
- Espaces mémoriels : l’inscription de la mémoire collective dans l’espace public : banderoles, "escraches", "cacerolazos", protestations et autres formes d’intervention pour "raviver" la mémoire.
- c) sphère publique transnationale ou diasporique
- l’intégration des émigrés politiques à la vie nationale des nouvelles républiques hispano-américaines au XIXe siècle et début du XXe siècle.
- le rôle fédérateur de la presse et des associations politiques. Le rôle des medias dans la construction des évènements historiques.
- d) espaces médiatiques et virtuels
- Littérature et histoire au regard de l’espace virtuel : internet comme fonds d’archive et comme source de création (langage internet/SMS, prose narrative et poésie de l’extrême contemporain)
- scène théâtrale et arts performatifs : de l’interaction avec la salle/public aux performances et autres modalités du théâtre participatif.