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Anglais / Etudes anglophones

Séminaire VORTEX 2013/2014 - L'ERREUR

Contact(s)

Université Sorbonne Nouvelle - Paris 3, Institut du Monde Anglophone, 5, rue de l'École de Médecine 75006 Paris,
Salle 16.

Objectifs

Pour la deuxième année consécutive, Vortex travaille sur l’erreur. L’étoilement de la notion, réalisé en 2012-2013, a permis de dégager quelques grands axes : une première série de travaux a porté sur un essai de typologie de l’erreur : l’erreur herméneutique et/ou perceptive (personnages de romans qui s’avèrent incapables de lire correctement les signes autour d’eux, tels Lockwood dans Wuthering Heights ou Lambert Strether dans The Ambassadors), l’erreur optique (confer la journée d’étude internationale sur Joyce, en juin 2013), l’erreur théologique (l’erreur perd-elle jamais son caractère de faute dans la littérature américaine, tout particulièrement ?). A ces perspectives centrales, on ajoutera cette année l’erreur spatiale (qui a partie liée avec l’errance) ou encore l’erreur de type mondain ou social (le faux pas, la gaffe, la faute de goût, éudiés par Kent Puckett, dans son Bad Form: Social Mistakes and the Nineteenth-Century Novel, OUP, 2009, et compris comme constitutifs de l’avènement du roman comme grande forme réaliste au dix-neuvième siècle. De fait, un deuxième axe de lecture a porté sur des questions relatives au genre : le roman de formation, pour des raisons évidentes, mais encore la poésie (essentiellement contemporaine, Elizabeth Bishop, Seamus Heaney), pour des raisons qui le sont beaucoup moins, mettent différemment en œuvre un rapport privilégié et quasi structurel à l’erreur. Est-ce à dire que le théâtre, provisoirement absent de nos travaux, ne touche à l’erreur que sous l’angle du comique et/ou de la comédie ? Ce serait bien réducteur. Reste que la transition est toute trouvée avec ce qui devrait encore suivre : la prise en charge de la vis comica (dont le fait de tomber ou de trébucher, micro-analogon de la Chute, constitue un puissant ressort), du rire (de quoi rit-on, sinon des erreurs ou travers de son prochain ?), du slip of the pen/tongue, du malapropism et autres déraillements ou dérapages langagiers plus ou moins nonsensiques (confer le “curiouser and curiouser” carrollien). Mais ces diverses considérations ne sauraient nous exonérer d’une réflexion sur l’essentiel à nos yeux, mais qui n’est pas forcément le plus simple à analyser : ce qui fait que la littérature mérite, au moins autant que les sciences, et pour des raisons qui lui sont irréductiblement propres, qu’on s’intéresse à l’erreur de type à la fois cognitif (en lien avec l’essor des sciences neuronales), éthique et pragmatique qu’elle met en œuvre et en scène, et ce alors même que le statut de la vérité (des faits ou de la théorie) n’y est en rien comparable à ce qu’il est dans le domaine des sciences. De même, sans écarter ou méconnaître les importants travaux conduits par Harold Bloom, Umberto Eco (mais encore Michel Charles et Bruno Clément, en France), sur les problèmes inhérents au Misreading, à la mésinterprétation (misprision), au « malentendu » (Jacques Rancière), à la « beauté du contresens » (Proust), au jugement ou commentaire porté sur le texte, pour aller (trop) vite, il nous paraît plus fécond de vouloir cibler, à nos risques et périls toutefois, les enjeux moins balisés d’une littérarité de l’erreur, apories comprises. 

Contenu

Parmi les pistes de travail qui nous occuperont, figureront, outre les actes manqués et autres lapsus interférant dans le processus de la création littéraire, le degré de fiabilité qu'un lecteur peut/doit accorder à l'instance narratrice, la place de l'erreur dans les romans dits d'apprentissage, le rapport de la fiction à l'histoire, dans sa dimension postcoloniale tout particulièrement - ainsi Midnight's Children (1981), où Salman Rushdie persiste à faire mourir son personnage d'Indira Gandhi « à la mauvaise date ». En élargissant l'erreur à l'errance (au sens spatial) et à l'égarement (au sens perceptif et intellectuel), on verra comment le franchissement plus ou moins hasardeux des frontières induit des contresens géographiques, cartographiques ou culturels, mais également tout un ensemble d'aberrations, en interface avec la problématique des sens et sensations. Dans le domaine cette fois de la poésie, outre le rappel de la théorie de Harold Bloom, fondée sur la mésinterprétation assumée de l'œuvre des poètes prédécesseurs et rivaux, on s'intéressera à l'usage qui veut que la poésie anglo-américaine, beaucoup plus ouvertement que la poésie française, fasse du punning une des clefs les plus sérieuses du mode de fonctionnement poétique - d'où il ressort que l'approximation, les glissements plus ou moins contrôlés d'une lettre à l'autre et autres dysfonctionnements à la rime, revêtent une importance souvent capitale : ainsi Geoffrey Hill jouant de sa surdité pour justifier l'approximation des signifiants et leur « correction » : « For definitely the right era, read, deaf in the right ear » (The Triumph of Love). En l'élargissant aux notions connexes que sont l'Errance et l'Hérésie, nous comptons bien, dans les deux-trois ans à venir, faire de l'erreur un objet de réflexion fécond, et ce d'autant plus qu'il est relativement peu étudié. En effet, contrairement aux erreurs de type médical, juridique ou scientifique, a priori parfaitement balisées, l'erreur « littéraire » est plus délicate à cerner ; certes les plus célèbres « howlers » sont notoirement recensés (Robinson Crusoe se déshabille, pour ensuite fourrer dans ses poches (absentes) le contenu de ses rapines ; un personnage de The Master of Ballantrae enfonce une épée dans le sol gelé ; Keats fait de Cortez le premier découvreur du Pacifique alors qu'il s'agissait, historiquement, de Balboa, etc.), mais il nous apparaît que la notion d'erreur se prête à une exploitation plus riche que celle d'un simple bêtisier de cet ordre, sans même qu'il soit nécessaire de solliciter l'exceptionnalité, voire l'incorrection, par ailleurs bien réelles, du geste littéraire. -- Le Nombre/ le nombreux. A mi-parcours du quinquennal, nous envisagerons la question du nombre. Nous sommes partis, pour le choix de cette problématique, de l'importance décisive que revêt, dans le terreau culturel anglophone, le symbolisme des nombres : de la Bible (The Book of Numbers; "Be fruitful and multiply"; « the Mark of the Beast 666 »), à ses reprises millénaristes et eschatologiques dans la culture américaine, suspendue dans l'attente du compte-à-rebours dernier, les nombres, entre fantastique et mystique, sont partout. Si nous n'avons ni compétence ni vocation à cerner les implications des nombres dans les domaines où ils trouvent le plus naturellement à s'exprimer (mathématiques, géométrie, algèbre, chimie, physique, etc.), les littéraires que nous sommes revendiquons néanmoins l'héritage de toute une tradition philosophique, et donc esthétique. La quête d'intelligibilité dans les rapports mathématiques et mesurables se traduit par la prise en compte concrète des proportions considérées comme plus ou moins esthétiques. Le rappel de la croyance philosophique ancienne (Pythagore et Platon), les débats des artistes à la Renaissance, nous remettront en mémoire la croyance dans l'existence de nombres idéaux, modèles de toutes choses (le fameux « nombre d'or »). Pour mémoire, selon les pythagoriciens, l'impair était symbole d'harmonie et le pair, de confusion. Qu'en est-il pour les modernes que nous sommes ? L'angoisse éprouvée devant les grands nombres et/ou l'indénombrable est un autre paradigme constitutif de la modernité étudiée par Vortex. Un point de départ serait l'ouvrage de Malthus, Essay on the Principle of Population, publié la même année que les Lyrical Ballads (1798) : angoisse d'un raz de marée démographique, en parallèle avec le mysticisme faussement naïf de la petite fille de « We Are Seven ». Un second serait le rêve du Malais, relaté par Thomas de Quincey dans ses Confessions of an English Opium Eater (1823), à l'origine d'une hantise de type raciste et colonial. On s'interrogera sur la manière dont se représentent, en peinture, la multitude (Derby Day (1858) de William Powell Frith), et, en littérature, le peuple, la foule. Le cinéma, celui par exemple de Peter Greenaway (A Zed & Two Noughts (1986), Drowning by Numbers (1988)), ne restera pas à l'écart. Ainsi donc, le roman et la poésie, mais aussi les arts anglo-américains, devraient se prêter à une analyse quantitativement et qualitativement équilibrée des incidences du nombre - des célèbres 1079 pages de Infinite Jest de David Foster Wallace, en passant par l'obsession comptable chez Whitman, Stevens, Zukofsy (« A-9 »), la folie du nombre dans l'œuvre de Pynchon, l'éloge des anniversaires (de Donne à Dylan Thomas), le sériel et la répétition chez Stein, Joyce, etc.
 

Horaires

Programme des prochaines séances :

Séance du 19 octobre : discussion autour de deux textes, “Young Goodman Brown”, de Nathanael Hawthorne, et le chapitre 2 de Alice in Wonderland (“The Pool of Tears”), de Lewis Carroll.

Séance du 9 novembre : rencontre avec Will Self, pour son dernier roman, Umbrella (2012), autour de la question de son rapport au modernisme. En exergue au roman, Self a inscrit cette phrase de James Joyce : "A brother is as easily forgotten as an umbrella", laquelle situe, d’emblée, la question de l’erreur (bungled act) comme l’un des enjeux du récit.

Séance du 30 novembre : discussion autour du roman de Joanathan Franzen, The Corrections (2001).

Séance du 11 Janvier 2014 : Claire Davison (Séance sur le modernisme)

Séance du 15 Février 2014 : Jean-Michel Ganteau (sur le thème de l'erreur et l'éthique)

Séance du 8 Mars 2014 : Susan Bernstein (sur Wordsworth and la synesthésie):

Séance du 21 Juin 2014: Laurent Mellet (sur le cinéma)

 

Elaboration collective des têtes de chapitre du Livre de l’Erreur (titre provisoire), qui aura pour objet de finaliser nos travaux sur l’erreur.

mise à jour le 19 mars 2019


Renseignements :

19-21 : Modernités critiques
UFR : Institut du Monde anglophone
Université Sorbonne Nouvelle - Paris 3
5, rue de l’Ecole de Médecine
75006 Paris

Tél. : 01 40 51 33 00
Fax : 01 40 51 33 19
 
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