Séminaire 4 : Silvestra Mariniello (Université de Montréal)
Le cinéma : lieu privilégié d’apparition de l’analogon
- lundi 24 avril, mardi 25 avril, jeudi 27 avril
S’inscrivant dans un projet de recherche plus vaste portant sur l’exemplarité au cinéma et du cinéma, ce séminaire questionne l’analogie comme une autre voie (r)ouverte à la pensée et la connaissance par le cinéma. L’hypothèse de fond de ce séminaire est que le cinéma est le lieu privilégié d’apparition de l’analogon, et que cinéma et photographie ont créé le milieu dans lequel il est devenu possible à la philosophie contemporaine de reconnaître l’analogie comme une autre voie pour la pensée, défiant l’hégémonie de la logique. Notre tâche sera donc de sonder la puissance du cinéma en tant que porteur d’une connaissance qui romprait avec les limites de la logique dichotomique pour accueillir le non-duel avec toutes ses implications.
Dans la première séance du séminaire on se concentrera sur la notion de paradigme chez Agamben et sur les enjeux épistémologiques et politiques de la méthode paradigmatique. « Paradigme » est le terme grec pour « exemple », mais si les études de l’exemple (exemplum) s’inscrivent généralement dans la logique binaire, inductive (du particulier de l’exemple à l’universel de la loi) ou déductive (de l’universel de la loi au particulier de l’exemple), le paradigme, tel que défini par Aristote, rompt avec la logique binaire et nous achemine sur une autre voie : la spécificité du paradigme est d’être un rapport de particulier à particulier et d'éluder le schéma dichotomique qui informe notre pensée ("en radicalisant la thèse d’Aristote, on comprend que le régime de discours [du paradigme] n’est pas la logique, mais l’analogie (...) L’analogon, qu’il produit, n’est ni particulier ni général.")
La deuxième séance sera consacrée à l’un des thèmes récurrents dans La linea e il circolo d’Enzo Melandri, tels que mis en évidence par Agamben dans son introduction, celui de la dichotomie/dipolarité : l’analogie permettrait de transformer les oppositions binaires, dichotomiques en « tensions polaires, dans lesquelles, exactement comme dans un champ électro-magnétique, elles perdent leur identité substantielle » avec quelles conséquences ? Des extraits de films nous aideront à comprendre l’analogie en tant que ce « dispositif qui, dans chaque antinomie et dans chaque aporie, exhibe leur nécessité (inevitabilità) logique et, en même temps, rend possible non pas tellement leur composition, mais leur déplacement et leur transformation.”(1) Ces déplacements et ces transformations feront l’objet privilégié de notre étude.
La troisième séance sera consacrée à un cas de figure : celui du rapport entre cinéma et histoire, et du choix de l’analogie comme seule possibilité pour le cinéma, condamné au présent des corps et des lieux (Pasolini), de re-produire l’Histoire.
(1) Giorgio Agamben, « Archeologia di un’archeologia » dans Enzo Melandri, La linea e il circolo. Studio logico-filosofico sull’analogia, Macerata, Quodlibet, 2004, p. XVI