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Séminaire de recherche : "Histoire(s) connectée(s)"

Séminaire du CERC 2016-2017 (Mardi 17-19h salle 414 Censier)

HISTOIRE(S) CONNECTÉE(S)

organisé par Carole Ksiazenicer-Matheron, Pierre Leroux, Fleur Kuhn-Kennedy et l’équipe doctorale de LGC de Paris 3


« Je me sens directement concerné par l'Afrique, non pas seulement en tant qu'homme s'intéressant à d'autres parties du monde mais encore plus profondément parce que je suis Juif et de ce fait plus sensible peut-être et plus proche d'un peuple tel que le peuple africain. »

André Schwarz-Bart

Cette phrase d’André Schwarz-Bart adressée au poète congolais Tchicaya U Tam’si témoigne d’une identification, d’une communauté de destin qui relie deux espaces en apparence très différents. Fondé sur de telles convergences, ce séminaire est inspiré par un double désir théorique : retrouver au plan comparatiste la fécondité des approches historiographiques s’inspirant de la notion d’histoire(s) connectée(s) ou partagée(s), redonner à une logique d’emblée globale et décentrée le grain serré des rencontres, des connexions, des lieux multiples d’hybridation qui redéfinissent une vision non européocentriste des pratiques et des transferts culturels ; et d’autre part, remettre en perspective la référence juive dans ce cadre conceptuel, étant donné que les contacts entre mondes juifs et non-juifs ont toujours été des embrayeurs, des accélérateurs et des transformateurs de ces croisements et de ces circulations. Par conséquent, le séminaire veut confronter les domaines (principalement yiddish et africain mais pas uniquement) et croiser les méthodes, les objets, les espaces. Il tente de débusquer les branchements, les connexions, les raccords, les analogies entre Histoire et histoires. Une partie des interventions concerne les mondes juifs, la littérature yiddish en particulier, conçue dans ses zones de mixité, ses déplacements, ses lieux de porosité, de translation et de fécondation réciproque, au contact des différents mondes (et textes) auxquels elle s’est toujours confrontée et dont elle s’est systématiquement nourrie. D’autres séances ouvriront la possibilité de croisements et de branchements théoriques avec des domaines entièrement différents, afin de constater expérimentalement la possibilité (ou non) de recoupements conceptuels, par le biais d’un comparatisme des affinités et des petites différences. L’œuvre de l’historienne Natalie Zemon Davis, au carrefour entre des mondes multiples évoqués de façon foisonnante, bien qu’avec une parfaite rigueur documentaire, servira d’entrée et de guide dans la problématique du séminaire, qui vise principalement à articuler littérature et histoire, narrativité et savoirs, poétique et recréation, par l’écriture, de mondes ouverts malgré la violence.

Comme l’un des exemples probants du caractère fondamentalement complexe de la littérature yiddish, nous aborderons la question du plurilinguisme qui se tisse au sein des textes comme lieu d’une réflexion sur les difficultés d’une élaboration identitaire, posant la question de la revalorisation des marges ou au contraire de la redéfinition des points de fuite au sein de la prose chez des auteures femmes, et notamment chez Esther Kreitman, qui tentent par les connexions et les disjonctions linguistiques de problématiser un monde en mutation.

La lecture de la poésie « africaine » d’Avrom Sutzkever sera l’occasion d’approcher l’image de l’Afrique en langue yiddish, ainsi que dans les traductions qu’elle a suscitées. Les possibilités qu’ouvre l’histoire connectée seront envisagées à travers et à la lumière de celles de la traduction, en tant que paradigme critique propice à penser connexions et passages en multipliant les langues.

Prolongement de ce dialogue entre des territoires culturels et linguistiques apparemment dépourvus de points de contact, l’œuvre d’André et de Simone Schwarz-Bart offrira quant à elle l’occasion d’aborder les zones de porosité entre écritures « juives » et « noires », entre l’imaginaire du yiddish et celui du créole, en s’interrogeant sur l’écriture de l’« étranger ».

Quant à l’historien Terence Ranger, en transformant les « rebelles » en « résistants » dans ses ouvrages historiques sur la résistance à la colonisation au Zimbabwe, il a opéré un renversement axiologique qui servira de matrice à de nombreux romanciers de sa génération. Les histoires croisées de ces réseaux d'intellectuels et de ces amitiés, permettront d’interroger comment la création littéraire s'est constituée en réponse et en regard des travaux de l'historiographie de l'époque.

Et beaucoup d’autres propositions (voir planning ci-contre) pour alimenter nos interrogations, aiguiser notre curiosité et satisfaire notre désir d’histoires connectées…

CALENDRIER DES SÉANCES

25 octobre – séance d’introduction (1/2)

Carole Matheron : Yiddish connections et autres histoires

Fleur Kuhn-Kennedy (Inalco) : Le yiddish au miroir du créole, pistes de réflexion

Jonas Matheron (Paris I-Panthéon Sorbonne): Rumeurs « indigènes » et discours colonial dans l’Algérie du Centenaire (1930)

15 novembre – séance d’introduction (2/2)

Pierre Leroux (Paris 3) : Branchements et métissages

Naomi Nicolas Kaufman : Connexions et traduction

Cécile Rousselet : Fascinations de l’ailleurs. Des poètes yiddish face à leurs autres orientaux

13 décembre

Michèle Tauber (Paris 3) : Du yiddish à l’hébreu : auto-traduction ou réincarnation – gilgul- chez l’écrivain Mendele Moykher Sforim ?

Arnaud Bikard (Inalco) : Élie Lévita et la Renaissance italienne

17 janvier

Lotte Arndt (Paris Diderot) : Les revues font la culture ! Négociations postcoloniales dans les périodiques parisiens relatifs à l'Afrique (1947-2012)

Pierre Leroux : De l’ouvrier au sorcier : représentations de la Chine dans l’imaginaire congolais

21 février (salle Max Milner, en Sorbonne)

Carole Matheron : Connecter le divers  (Natalie Zemon Davis : une historienne et ses personnages)

Béatrice Munaro : La position narrative du témoin. Connexions entre instance mémorielle individuelle et collective au prisme de la corporéité de l’écriture, chez Charlotte Delbo et Primo Levi

7 mars (salle Max Milner, en Sorbonne)

Naomi Nicolas Kaufman : Les poèmes africains du poète yiddish Avrom Sutzkever

Cécile Rousselet : Hybridité et connexions linguistiques dans l’écriture yiddish au féminin. Le plurilinguisme au miroir de la complexité d’une identité féminine juive chez Esther Kreitman

14 mars (salle Max Milner, en Sorbonne)

Raphaël Sigal (Amherst College) : La magie—cette pratique (Artaud et la lecture)

21 mars (salle Max Milner, en Sorbonne)

Françoise Blum-Ophélie Rillon (Paris I-Panthéon Sorbonne) : Autobiographies de militant-e-s dans l'Afrique coloniale et postcoloniale

Martine Leibovici (Paris Diderot) : Emma Goldman (1869-1940), une anarchiste non orthodoxe

25 avril

Elara Bertho (Paris 3) : Terence Ranger et la notion de résistance nationale, entre histoire et littérature

Sadia Agsous (EHESS) : La poésie hébraïque en arabe : le cas de Haim Nahman Bialik

17 mai

Fleur Kuhn-Kennedy : De la Pologne aux Antilles. Le cycle schwarz-bartien ou l’œuvre « réversible »

Pauline Armenoult : L’écriture du 11 septembre. La représentation fictionnelle de l’événement traumatique dans The Sorrows of an American de Siri Hustvedt

13 juin

Myriam Suchet (Paris 3) : Connexions, branchements, liaisons et autres embrayages : interroger les termes des relations indisciplinaires

Souleymane Bachir Diagne (Columbia University) : Le postcolonial et l'universel


mise à jour le 24 octobre 2016


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