Pouvez-vous vous présenter et nous détailler votre parcours universitaire ?
Je suis Morgane Belhadi, docteure depuis décembre 2022 en Sciences de l'information et de la communication de l'Université Sorbonne Nouvelle Paris 3. Après des années d'étude en Histoire de l'art et archéologie à l'Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, j'ai poursuivi mon cursus en Information-communication à Paris 3 jusqu'au doctorat.
En 2022, vous avez soutenu votre thèse « Affiches politiques et populisme en France : vers une nouvelle esthétique ? », pouvez-vous nous parler plus en détail de cette thèse ?
Cette thèse s'intéresse à la place des affiches politiques en France, et plus particulièrement à la manière dont elles sont fortement mobilisées par les partis dits populistes, en ce qu'elles leur permettent d'exprimer leurs idéologies respectives et d'accroître leur visibilité.
Cette année vous avez reçu le Prix du jeune chercheur·e francophone en sciences de l'information et de la communication. Quels étaient les principaux objectifs de votre projet de recherche et comment avez-vous abordé ces questions dans votre travail ?
L'objectif était double : d'une part, insister sur le rôle joué par les affiches politiques en France, alors que la communication numérique occupe une place de choix ; et d'autre part, apporter un nouvel éclairage sur le populisme, par le prisme de son esthétique.
Lorsque j'ai commencé ma thèse, le populisme était un objet d'étude encore relativement peu exploré, surtout en France (alors qu'il est très en vogue aujourd'hui !), ou alors il était souvent investigué du point de vue idéologique. L'approche esthétique telle que je la conçois et l'ai développée dans mon travail de recherche se fonde sur la représentation visuelle, la symbolique, les affects, ainsi que les récits visuels qui se tissent à travers les images des partis populistes, et ce en tenant compte d'un contexte fortement médiatisé et concurrentiel.
Qu'est-ce qui vous a inspiré à vous lancer dans ce domaine de recherche spécifique en sciences de l'information et de la communication ?
Étonnamment peut-être, ce sont mes études en histoire de l'art qui m'ont donné envie d'embrasser la voie de la recherche en information-communication : je me suis très vite intéressée à des artistes dont l'œuvre était militante et politisée, tandis que mon appétence pour les médias et la communication politique s'est accrue. Arrivée en Master, je me suis passionnée pour l'élaboration de mon mémoire, qui portait déjà sur les affiches politiques. Et pour mener à bien mes analyses d'affiches, j'ai souhaité - soutenue dans mon entreprise par mon directeur de thèse - adopter une méthodologie inspirée à la fois de la sémiologie en information-communication et de ce que j'avais appris par le passé en histoire de l'art - notamment la méthode iconologique. La boucle était bouclée si je puis dire.
Il faut ajouter à cela qu'au cours de mes premières années de thèse, vers 2016-2017, j'ai découvert des travaux anglo-saxons, peu nombreux à l'époque, qui traitaient du populisme en tant que style spécifique de communication politique (c'est l'approche stylistique), s'inscrivant ainsi dans une démarche très proche de la mienne : cela m'a confortée dans l'idée de défendre une approche esthétique du populisme.
Quels sont vos projets à l’issue de votre doctorat ?
Je compte poursuivre mes recherches sur la dimension esthétique et affective du populisme. Pour ce faire, j'aimerais me lancer dans d'autres études comparatives d’organisations politiques en France et au-delà, à travers leurs productions visuelles (affiches, spots de campagne, images partagées sur les réseaux sociaux numériques...).
Quels conseils donneriez-vous aux jeunes chercheurs·euses qui s'intéressent aux sciences de l'information et de la communication ?
Je leur conseillerais de persévérer dans leur démarche et leur intuition de départ - car, me semble-t-il, tout part d'une intuition très forte sur les angles morts à investiguer dans un domaine de recherche.
Je leur dirais aussi de ne pas hésiter à participer à des journées d'étude transdisciplinaires en France et à l'étranger pour se confronter au regard critique - mais souvent bienveillant et constructif ! - de chercheurs en herbe ou confirmés. Les échanges qui s'y produisent sont toujours enrichissants et très stimulants, tant sur les plans intellectuel, culturel et humain ; même si l'on ne voit pas nécessairement tout de suite de résultats concrets, ils permettent réellement de progresser et de s'épanouir dans le milieu de la recherche.
Et enfin, dernier conseil, ne pas avoir peur de donner des cours car c'est aussi en enseignant qu'on apprend !
En un mot : faites-vous confiance !