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Le crayon

Le crayon


Le CRAYON
Mélissa Bertrand

Un contact d’abord, un contact surtout. Prendre en main le crayon comme sa pensée, porter son courage à bout de bras pour exprimer calme ou rage. Comme un prolongement du doigt qui soudain colore la feuille, griffe, griffonne le papier, le crayon mal taillé brosse à gros traits, entaille la feuille, déflore la blancheur. Plus de virginité quand par l’encre la feuille est tachée. Incision de la mine dans la chair immaculée du papier.
Déchirer le silence, crier seul, faire crisser, faire crier le crayon.
Le crayon, pourtant, est encore l’ébauche, le produit brut, la gestation, la mise en forme. Pouvoir se dire « mon cri n’est pas encore assez beau », pouvoir retourner dans le temps, dessiner d’autres chemins. Garder les traces de l’errance ou laisser le flux et le reflux de la gomme émietter les traits effacés. Puis tailler, sculpter, entamer la chair résistante de cette lance à la pointe teintée pour mieux jeter les mots et les contours dans un carnet, à la va-vite, de façon précipitée ou avec la précision de l’homme apprêtant sa réflexion. Tailler, tailler le crayon pour que nous créions – tailler, tailler le crayon.


mise à jour le 28 avril 2015


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