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Index des commentateurs A-G

ACRON et PORPHYRION
Notice de Nathalie Dauvois
Les annotations que nous avons conservées sous le nom d'Acron et Porphyrion, scoliastes des IIe et IIIe siècle de notre ère ne sont pas en fait toutes de ces deux auteurs. A la fin du second siècle Helenius Acron écrivit des commentaires sur Térence et Horace. Porphyrion lui-même cite Acron. Mais le nom d'Acron ne figure dans aucun texte avant le XVe, l'attribution dut être faite par un humaniste, et on attribua à Acron toute une série de scolies. On peut consulter à ce sujet Otto Keller, "Comment les scolies porphyroniennes ont-elle pris le nom d'Acron ?", Mélanges Boissier, 1903, p. 311-314. Keller distingue trois époques dans les scolies du Pseudo-Acron : les 5e, 7e et 8e siècles. La plus grande partie des scolies pseudacroniennes dérivent du commentaire de Porphyrion, certains détails peuvent provenir du véritable Acron. On peut au demeurant distinguer les deux commentateurs. Le commentaire d'Acron est principalement historique et savant, celui de Porphyrion est celui d'un maître d'école. On trouve les scolies d'Acron et Porphyrion dans l'édition Keller et Holder. Mais comme l’a montré K. Friss-Jensen (1997) citant G. Noske (1969), l’édition Keller d’Acron ne tient pas assez compte de la question des sources multiples du commentaire transmis en marge des manuscrits d’Horace au Moyen Age et attribué à Acron seulement par les humanistes italiens.

Pomponi Porfyrionis commentum in horatium Flaccum recensuit A. Holder, Innsbruck, 1894.
Pseudoacronis Scholia in Horatium vetustiora, recensuit O. Keller Leipzig, 1902-1904.

Borzsák, István, "Esegesi antica", in Enciclopedia Oraziana III, Scevola Mariotti et
al. eds, Rome, Orsa Maggiore, 1998, 17-23.
Diederich, Silke,  Der Horazkommentar des Porphyrio im Rahmen der kaiserzeitlichen Schulune Bildungstradition, Berlin, Walter de Gruyter, 1999.
Friis-Jensen, K., "Medieval commentaries of Horace", p. 51-74 in Medieval and Renaissance Scholarship, éd. par N. Mann et B. Munk Olsen, Leiden-New York-Cologne, Brill, 1997, notamment p. 51-52.
Kalininan, Antonina, Der Horazkommentar des Pomponius Porphyrio : Untersuchungen zu seiner Terminologie und Textgeschichte, Stuttgart, Franz Steiner, 2007.
Langenhorst, August, De scholiis Horatianis quae Acronis nomine feruntvr quaestiones selectae, Bonn, 1908.
Noske, Gorttfried, Quaestiones pseudacronea, Diss. Munich, 1969.
Taraskin, Paulina, "Horace scholiasts Porphyrio and 'Acro' in early modern printed editions. (1474—1838)", Studia Aurea, 7, 2013: 339-364. Article en ligne.
Wessner, Paul, "Quaestiones Porphyrioneae",  Commentationes philologae Ienenses 5, 1894, p.153-196.

AMARITON, Jean (ca. 1525-1590)
Notice de Michel Magnien

Jean Amariton, est natif de la petite bourgade de Nonette, une ville de Limagne, en Auvergne (dans l’actuel Puy de Dôme). Il fait partie de cette « infinité de graves & doctes personnages » issus de « cette nation d’Auvergne », salués par La Croix du Maine dans sa notice consacrée à Jean de La Guesle « la plupart desquels sont venus faire leur demeure en ceste tant renommée & partout célébrée ville de Paris lesquels ont obtenu des états et offices les plus honorables au Parlement d’icelle, & l’ont tellement illustrée » (éd. Rigoley de Juvigny, t. I, p.516-7). Comme Jean de La Guesle, ou encore Antoine Duprat, Antoine Du Bourg, Pierre Lizet, ou bien entendu Michel de L’Hospital, sans oublier Jean Bardon, procureur du Roi, dédicataire du commentaire d’Horace, qui ont tous, à titre divers, fréquenté un temps le Palais, Amariton fera sa carrière comme avocat au Parlement de Paris.

Même s’il est difficile de confirmer ou d’infirmer les dires d’Antoine Loisel, son ancien disciple (qui publie d’ailleurs deux distiques louangeurs à l’adresse de son maître au bout de ce commentaire horatien), selon qui « Jean Amariton Père, comme j’ay appris de M. Voile, Prieur de saint Clair, Licencié en Theologie, son petit-fils, estoit d’une ancienne famille de Nonette en Limagne d’Auvergne, sortie d’un Pierre Amariton qui fut Chancelier du duc de Berry & d’Auvergne, frere du Roy Charles V », sa famille (au sens large) est honorablement connue et active à Nonette au XVIe siècle : on y compte, selon P. Fr. Fournier « un barbier, un cordonnier, des marchands et un praticien ». Les différentes biographies ou généalogies consultables au Cabinets des ms. de la BnF proposent des noms pour les parents et même une date de naissance pour notre Jean (1525), mais rien ne se recoupe ni ne semble avéré selon le même Fournier. On ne sait rien non plus de sa formation initiale.

Toutefois, mais à une date qu’il est difficile de préciser, on le retrouve collégien à Paris, pensionnaire au sein du bastion ramiste qu’est pour lors le Collège de Presles. Les liminaires de son commentaire permettent en effet de connaître certains des maîtres dont il a suivi l’enseignement à Paris ; Amariton y a en effet placé ces quatre distiques, où le grand Ramus se voit apostrophé :

Ad doctores suos. // Ioannis Amaritonis Octastichon

Grenetus Latiae posuit fundamina linguae

    Eius me docuit lingua diserta loqui.

Dicendi leges didici dicente Talaeo :

    Et logica per te cognita, Rame, via est.

Adiecit sophiae Philaretus dogmata sanctae,

    Naturae mores hoc reserante patent.

De tantis sequitur mea si quid pagina, vestrum est.

    Quisquis suae, si sit, vendicet artis opus. (IANC, f. 5 v°]

 Au sein des mêmes liminaires, le début de la préface nous apprend qu’en 1550 il a déjà achevé son cycle de philosophie, et que, comme le fera Nancel en 1553, il prend alors une charge d’enseignement au sein du collège qui l’a formé. Or comme dans le premier distique de la pièce à ses maîtres, il évoque son apprentissage de la grammaire latine sous la férule de ce Grenet, qu’on identifie mal, on peut penser qu’Amariton est arrivé à peine adolescent à Presles et qu’il y a suivi l’ensemble de son cursus.

C’est donc en 1551/52, qu’en charge du cours de philosophie morale, il prend la décision, dans le cadre de la conjonction de l’éloquence et de la philosophie alors programmée par Ramus, de faire étudier les Epîtres d’Horace, au sein de son cours d’éthique, cours qui se trouve à l’origine de son commentaire de la seule première épître d’Horace, qui est en fait le premier commentaire poétique ramiste jamais publié (en juillet 1553).

Mais cette expérience de l’enseignement fut sans doute de courte durée, puisque Amariton, tout comme un peu plus tôt son ancien condisciple Estienne Pasquier, ne tarde point à quitter le collège de Presles pour aller entreprendre des études juridiques à Toulouse. Là il gagne les bonnes grâces d’un autre humaniste d’importance, Cujas, qui l’autorise même à publier des notes de sa main qu’Amariton avait découvertes dans les marges d’un exemplaire d’Ulpien que Cujas lui avait prêté. Amariton se trouve être ainsi à l’origine de, ou au moins mêlé à – car tout cela sent la mise en scène et semble une version édulcorée du topos du manuscrit volé qui emplit tant de liminaires de l’époque –, la première publication jamais accomplie par le grand juriste : Tituli XXVIIII ex corpore Ulpiani. In eosdem titulos Notae, Toulouse, G. Boudeville pour P. Du Puy, nov. 1554, in-16 de 4 ff. prelim, n. ch., 158 pp. et 1 f. n. ch. (trois ex. connus seulement d’après l’USTC : Toulouse, Res. D. xvi. 198, Troyes, Jurisp. 226 et Bayerische, J.rom. f. 151 [6264238 ; ex. accessible en ligne]).

On ignore là encore s’il quitta Toulouse peu de temps après cette publication ou s’il y a enseigné le droit comme le prétend Loisel. Une chose est sure, c’est qu’à une date difficile là encore à déterminer, il revint à Paris, où il se fixa définitivement et devint avocat, à tout le moins avant le 10 juin 1562, jour où il prononce sa profession de foi catholique devant le Président, comme le voulait l’arrêt du 6 juin 1562. A une date là encore inconnue, il épouse Marie Mesmin, fille de Pierre Mesmin, procureur du Parlement de Paris, confirmant par là son inscription définitive dans le monde des robins parisiens. Il en eut au moins deux fils, Jean II & Antoine, devenus eux aussi avocats, et plusieurs filles (dont une seule est identifiée : Suzanne, mère de ce M. Voile qui donna des documents sur la famille Amariton qu’exploitera Loisel dans son Dialogue des avocats). Selon le même Loisel, il n’aurait pas été un orateur hors pair, mais devait plutôt sa réputation à ses consultations. Grâce au témoignage qu’il a laissé dans son ouvrage de controverse avec Possevin, nous savons qu’Amariton héberge en 1565 un jeune polonais, Johannes Lasciki, venu suivre à Paris les cours de Ramus. Comme son condisciple Bodin, Amariton semble croire à l’existence des sorciers, puisqu’au sortir d’un des procès de sorcellerie auquel ils avaient tous deux assisté, il aurait déclaré à son hôte qu’il existait alors plus de seize mille sorciers en France, capables des pires maléfices. En 1571, au moment de la levée du don de 300 000 livres consenti par les Parisiens, il est l’un des habitants les plus taxés de la rue Saint-Jean de Beauvais où il a élu domicile.

C’est enfin encore une fois Loisel qui nous informe des derniers mois de son existence. Après l’assassinat du duc de Guise, il est en effet emprisonné par la Ligue, du 31 juillet au 5 août 1589, et il meurt à en croire Loisel à la levée du second siège de Paris, loin de ses fils qui avaient suivi le Parlement à Tours. Ses biens et sa bibliothèque sont alors pillés par les Ligueurs. Or comme tant de ses confrères juristes, Amariton semble avoir amassé une fort riche collection, en particulier des manuscrits rares, dont quatre, l’un remontant au IXe siècle, sont recensés par P. Fr. Fournier dans son article. On sait par exemple qu’Elie Vinet a sollicité son aide afin qu’il identifie des toponymes auvergnats, alors qu’il travaillait à son édition de Sidoine Apollinaire et lui a également emprunté un manuscrit du Carmen de Ponderibus.

Texte : Ioannis Amaritonis Nonetani Commentariorum in epistolas Q. Horatii Flacci, Liber primus. Ad Amplissimum Joannem Bardum in magno Consilio procuratorem Regium. Invia virtuti nulli est via [Ovide, Met., XIV, 114], Paris, Benoît Prevost pour Guillaume Julien, 1553, in-8° de 44 ff., consultable sur Gallica : NUMM-6215544.

 

Littérature critique

Henryk Barycz, & Ambroise Jobert, « Humanisme et fanatisme à Paris (1541-1572), d'après quelques polonais », Revue d'Histoire moderne et contemporaine, t. 29,1, janv.-mars 1982, p. 105

P.-Fr. Fournier, « Jean Amariton de Nonette, professeur au collège de Presles, avocat au Parlement de Paris, mort en 1590 ; sa vie, ses ouvrages, sa famille », Mémoires de l’Académie des Sciences, Belles Lettres et Arts de Clermont-Ferrand, t. XXXII-II (Mélanges ; t. XCII de la coll. des Annales & Mémoires), 1929-1932, p. 69-98 (il en existe un tiré-à-part, Clermont-Ferrand, Impr. Générale, 1933). On pourra également consulter sa longue notice au sein du DBF (t. II, Paris, Letouzey-Ané, 1936, col. 426-7).

P. Fr. Fournier, « La première édition des notes de Cujas sur Ulpien », Nouvelle revue historique de droit français & étranger, 1919, t. XLIII, p. 663-5.

P. F. Girard, « La jeunesse de Cujas. Notes sur sa famille, ses études et son premier enseignement (Toulouse, 1522-1554) », Nouvelle Revue Historique de droit français et étranger, 40e an., t. XXXIX, 4, oct. -déc. 1916, p. 606-623.

Raymond Lebègue, « Horace en France pendant la Renaissance », BHR, III, 1936, p. 141-166, 289-308 & 384-419. Le commentaire d’Amariton y est évoqué p. 290-1, 385 & 406, sa préface partiellement transcrite en appendice p. 419.

Floris B. Verhaart, « Horace and Ramist Dialectics : P. Gaultier-Chabot (1516-1598 ?) Commentaries », in K. A. E. Enenkel éd., Transformations of the Classics via Early Modern Commentaries, Leyde, Brill, 2014, p. 15-46 [v. p. 17-22]

BADE, JOSSE - BADIUS ASCENSIUS, JODOCUS (1461-1535)
Notice de Nathalie Dauvois
D'abord élevé chez les frères de la vie commune à Gand, Josse Bade poursuivit ses études à Louvain puis en Italie, où il fut l'élève de Battista Guarino et brièvement de Philippe Béroalde l'ancien. Il enseigna à Valence et à Lyon et commença à publier (notamment ses Sylvae morales) chez le libraire Jean Treschel, dont il devint le correcteur puis l'associé.
En 1499, il s'installa à Paris et à partir de 1503 à son propre compte sans doute avec l'aide du libraire Jean Petit. Il poursuivit ses activités d'éditeur scientifique tout en imprimant. Son atelier était le rendez-vous des humanistes. Gravitait autour de son atelier tout un cercle de collaborateurs (Bérauld, Dubois), les Ascensiani. Il entretenait par ailleurs des relations avec la plupart des grands humanistes européens.
Josse Bade édita durant toute sa vie les classiques latins, en fournissant des commentaires. Dès 1500, parurent ses commentaires familiers sur les épîtres, les satires et l'art poétique d'Horace dont des fragments avaient déjà paru dans les Sylvae morales, la première édition des épîtres date d'octobre, celle des satires a dû la précéder. L'ensemble de ces commentaires d'Horace est réuni en 1503. On trouve dans les éditions suivantes de Josse Bade, outre les gloses d'Acron, Porphyrion et Mancinelli, des annotations d'Alde Manuce, et de M. Bonfini (dans l'édition de1519). En 1543, sont ajoutées les annotations d'Henri Glarean, en 1546, celles de Parrhasius, d'Erasme, Politien, Sabellicus, de Cælius Rhodiginus, de Pio, de Crinitus, de Robortello, etc., dans une sorte de processus additionnel qui réunit l'aréopage humaniste le plus large et le plus européen.

Renouard, Ph., Bibliographie de Josse Bade Ascensius, Paris, 1908, sur Horace, II, p. 496 et s.
Renouard, Ph., Imprimeurs et libraires parisiens du XVI siècle, Paris, 1969, II, 6-297. Version numérisée.
Contemporaries of Erasmus, I, 79-81.
Diu, Isabelle, « Medium typographicum et respublica literaria : le rôle de Josse Bade dans le monde de l'édition humaniste », Le livre et l'historien, Genève, Droz, 1997, p. 111-124.
Josse Bade, dit Badius (1462-1535), préfaces de Josse Bade, (1462-1535), trad., intr. et notes par M. Lebel, Louvain, Peeters, 1988.
White, Paul, Jodocus Badius Ascensius, Commentary, Commerce and Print in the Renaissance, Oxford, Oxford University Press, 2013, notamment p. 73-93 sur la démarche du commentaire familier et p. 244 et s. sur le rôle central d'Horace dans sa conception de la littérature et notamment de la satire.
 


CRINITO, PIETRO - CRINITUS, PETRUS (1475-1507) [Pietro Del Riccio Baldi]
Notice de Nathalie Dauvois
Né à Florence, Crinito étudia la rhétorique sous Politien et les classiques sous P. Sassi et U. Verino. Il est un des disciples les plus importants de Politien, hérita de sa bibliothèque et de ses papiers et fut son éditeur posthume. Crinito rencontra Savonarole et Pic de la Mirandole et participa à l'académie platonicienne. Après l'invasion de l'Italie par Charles VIII et la chute des Médicis en 1494, il alla de Naples à Rome, Venise et autres cités italiennes avant de revenir à Florence.
Son œuvre la plus célèbre est le De honesta disciplina, collection de lieux communs, publiée à Florence en 1504, et très souvent réimprimée. Comme Rhodiginus, Perotti ou Volterrani,, il travaille dans cet ouvrage à préparer les matériaux de la nouvelle culture. Le DHD n'est pas seulement constitué de matériaux disparates, certaines questions en structurent et unifient le propos. Comme Isidore de Seville qui appelait honesta la grammaire, l'humaniste florentin parle d'humaniores artes, d'honesta disciplina, montrant clairement qu'il voulait consacrer la littérature à l'humanitas chère à Valla, Bruni ou Politien. Il cherche une méthode d'étude qui soit aussi une discipline, l'humanitas, comme capacité à former et diriger dans l'activité scientifique et théorique et dans la vie pratique et civile, à l'exemple des anciens, les nouvelles générations
Ses Libri de poetis latinis, Florence, 1505, constituent la première biobibliographie sur une catégorie particulière d'auteurs. Sa vie d'Horace accompagne presque toutes les éditions des Opera au long de la Renaissance.
Il est enfin l'auteur d'une vie de Salluste, de commentaires des lettres de Cicéron, des fables d'Esope et des œuvres d'Horace.
Les trois œuvres principales de Crinito, le De honesta disciplina, le De poetis latinis et les Poemata sont publiées par Josse Bade et contribuent à la diffusion de l'humanisme italien en France.

De Honesta disciplina, Rome, 1955  édition C. Angeleri avec une préface d'E. Garin.
A. Mastrogianni, Die Poemata des Petrus Crinitus und ihre Horaz imitation, Einleitung, Text, Übersetzung uned Kommentar, Hambourg, 2002.
Cont. of Erasmus, I, 358-9

Ann Moss, « Humanists and the invention of Literary History », Acta conventus Neo-Latini Bariensis, Tempe, Arizona, 1988, p. 411-417.
P. Galand-Hallyn, « Les miscellanées de Pietro Crinito : une philologie de l'engagement et du lyrisme », in Ouvrages Miscellanées et Théories de la connaissance à la Renaissance, études réunies par D.de Courcelles, Paris, Ecole des Chartes 2003, p. 57-77.


DENORES (DE NORES), GIASON - DE NORES CIPRIUS, IASON (1530-1590)
Notice de Monique Bouquet (complétée par Astrid Quillien)
La date de sa naissance est incertaine (1510, selon Nicolaou Konnari), mais au vu de son parcours, on peut penser qu’il est né à Nicosie autour de 1530. Il appartient à une famille chypriote qui a des liens étroits, diplomatiques et matrimoniaux, avec les aristocrates de la Sérénissime et il vient alors à Venise, avant d’étudier à Padoue sous la conduite de Trifone Gabriele et de Sperone Speroni, à qui il doit beaucoup pour sa réflexion sur la rhétorique et la poétique. Une fois ses études terminées (vers 1553), il revient à Chypre où il compose son commentaire à l’Ars Poetica d’Horace en hommage à son maître vénéré, Gabriele, qui vient de mourir.
S’il y a peu (ou pas) de traces de son activité littéraire sur l’île, en revanche on dispose de nombreux témoignages de son activité intellectuelle dès son retour à Venise en 1570, date à laquelle il devient membre de l’Accademia Pellegrina en même temps qu’il enseigne la rhétorique au studio de Padoue. C’est en 1577 qu’il occupe à Padoue la chaire de philosophie morale et politique (anciennement occupée par Robortello), date à partir de laquelle il publie de nombreux traités et discours, en italien et en latin.
Alors que son commentaire à l’A.P. a été publié à Venise en 1553 (et à Paris en 1554), c’est à Padoue principalement qu’il publie des ouvrages relatifs à la rhétorique ancienne (aristotélicienne et cicéronienne) ainsi qu’un traité de rhétorique de sa façon Della Rhetorica (1584). C’est à l’occasion de la publication, en 1586, de son Discorso intorno a que' principii, cause, et accrescimenti che la comedia, la tragedia et il poema eroico ricevono dalla filosofia morale e civile e da' governatori delle Repubbliche, que s’engage entre lui et Guarini (auteur du Pastor Fido) une polémique violente sur la tragicomédie pastorale, que Denores vient de censurer dans son Discorso (après Speroni dans sa Canace) car, selon lui, ce genre trop inféodé à l’hédonisme menace les valeurs morales et contrevient au principe de l’utilité sociale et morale de la poésie. S’ensuivent des textes de répliques de part et d’autre qui aboutissent à la censure de Denores, lequel publie en 1588 sa propre Poetica ( toujours à Padoue).
Il meurt en 1590 : il s’est exilé suite à la condamnation de son fils Pietro pour meurtre, après avoir cependant composé un Panegirico in laude della serenissima Reppublica di Venezia.
Denores se singularise par sa capacité à renouveler la réflexion sur l’art, à prendre à parti ceux qui tranchent en faveur d’une théorie plutôt qu’une autre, notamment dans le cadre de la poétique et de la rhétorique platoniciennes ou aristotéliciennes (cf. Grifoli), à vouloir instituer des règles qui prennent en compte l’environnement culturel, politique, social de son temps. Il s’ensuit une vigueur et une liberté de pensée et de parole qui en font un représentant notable de la culture contreréformiste.
 
Œuvres de Denores :
In epistolam Q. Horatii Flacci de arte poetica Iasonis de Nores Ciprii ex quotidianis Tryphonis Cabrielii sermonibus interpretatio. Eiusdem breuis, et distincta summa praeceptorum de arte dicendi ex t tribus Ciceronis libris de oratore collecta, Venetiis, apud Aldi filios, 1553. (Venetiis, apud Andream Arriuabenum, 1553). version numérisée. 
In epistolam Q. Horatii Flacci de arte poetica Iasonis de Nores Ciprii ex quotidianis Tryphonis Cabrielii sermonibus interpretatio, Parisiis, apud viduam Mauricii à Porta, in clauso Brunello, sub signo D. Claudii, 1554. version numérisée
Horatiani hujus voluminis tomus alter […] Franciscus Luisinus Utinensis in Artem poëticam. Jacobus Grifolius Lucinianensis in Artem poëticam. Jason de Nores Cyprius in Artem poëticam…, Basileae, apud Henrichum Petri, 1555.
Breue trattato del mondo, et delle sue parti, semplici, et miste. Con molte altre considerationi, che di grado in grado saranno più notabili, & più degne di cognitione, di Jason Denores, Venetia, appresso Andrea Muschio, 1571.
Breue trattato dell'oratore di m. Iason Denores alla studiosa et ualorosa gioventù de nobili della illustrissima Republica vinitiana. Discorso del medesimo intorno alla distinzione, deffinitione & diuisione della rhetorica, Padoua, appresso Simon Galignani, 1574.
Breue institutione dell'ottima republica di Iason Denores, raccolta in gran parte da tutta la philosophia humana di Aristotile, quasi come vna certa introduttione dell'Ethica, Politica, et Economica, Venetia, appresso Paolo Megietti, 1578.
Oratione di Iason Denores al sereniss. principe di Venetia Sebastian Veniero, per nome di quei gentil'huomini del regno di Cipro, che dopo la perdita della patria si trouarono presenti nel tempo della sua felicissima, Padoua, [Paolo Meietti], per Lorenzo Pasquati, 1578.
In M. Tullii Ciceronis vniuersam philosophiam de vita, et moribus ... Ioannis Denores breuis, & distincta institutio, Patauii, apud Paulum Meietum, 1581.
Tauole di Jason Denores del mondo, et della sphera, le quali saranno, come introduttione a' libri di Aristotile Del cielo, Delle meteore, & De gli animali. Con la Spheretta del clarissimo Triphon Gabriele, Padoua, appresso Paulo Meietto, 1582.
De constitutione partium uniuersae humanae, et ciuilis philosophiae, quam Aristoteles sapienter conscripsit, ad clarissimum, et nobilissimum iuuenem Thomam Maripetro, clarissimi viri Stephani filium, et morib. et studiis eius uere amatorem, et fautorem, Patauii, apud Paulum Meietum, 1584.
Della rhetorica di Giason Denores libri tre. Ne' quali, oltra i precetti dell'arte, si contengono vinti orationi tradotte de' più famosi, & illustri philosophi, & oratori con gli argomenti loro, discorsi, tauole et ruote, Venetia : appresso Paolo Megietto, 1584.
Della rhetorica di Giason Denores libri tre, ne' quali, oltra i precetti dell'arte, si contengono vinti orationi, tradotte de' piu famosi philosophi, et oratori: con gli argomenti loro, et artificii, Venetia, appresso Giorgio Angelieri, 1584.
Discorso di Iason Denores intorno a que' principii, cause, et accrescimenti, che la comedia, la tragedia, et il poema heroico riceuono dalla philosophia morale et ciuile, et da' gouernatori delle republiche, Padoua, appresso Paulo Meieto, 1586 (et 1587).
Poetica di Iason Denores nella qual per via di definitione et diuisione si tratta secondo l'opinion d'Arist. della tragedia, del poema heroico, et della comedia, Padoua, appresso Paulo Meietto, 1588.
Sphera di Iason Denores raccolta da nobilissimi scrittori, et con nouo ordine sommamente facilitata. A gl'illustrissimi signori academici innominati di Parma. Discorso del medesimo intorno alla geografia, Padoua, appresso Paolo Meietti, 1589.
Panegirico di Iason De Nores in laude della sereniss. Rep. di Venetia, Padoua, appresso Paolo Meietti, 1590.
Apologia contra l'auttor del Verato di Iason De Nores di quanto ha egli detto in un suo discorso delle tragicomedie, et delle pastorali..., Padoua, appresso Paolo Meietti, 1590.

Sources secondes :
Budd, F. E.,  « A Minor Italian Critic of the Sixteenth Century : Jason Desnores », Modern Language Review 22, 1927, p. 421-34. 
Dauvois, Nathalie, "Le commentaire de Jason Denores à l’Art poétique d’Horace: une théorie de la mimésis métaphorique", B. Petey-Girard / C. Trotot (éd.), Métaphores, savoir et arts au début des temps modernes, Paris, Garnier, 2015.
Nicolau-Konnari, Angel, "L’identité dans la diaspora: travaux et jours de Pierre (avant 1570 (?)-après 1646) et Georges de Nores (1619-1638)", Sabine Fourrier and Gilles Grivaud (eds.), Identités croisées en un milieu méditerranéen : le cas de Chypre (Antiquité – Moyen Âge), Mont-Saint-Aignan, Publications des Universités de Rouen et du Havre, 2006), pp. 329-353.
Nicolau-Konnari, Angel, “Francesco Patrizi’s Cypriot Connections ang Giason and Pietro De Nores”, Cyprus and the Renaissance (1450-1650) Brepols 2012, p. 157-204. (cf. En particulier, n. 8-9 pour l’œuvre de Denores et les études critiques de cette œuvre).
Patrizi, Giorgio, "Denores, Giasone", Dizionario Biografico degli Italiani - Volume 38 (1990).
Jourde, M. – Monferran, J.-C., "Jacques Peletier, Lecteur de Giason Denores : une source ignorée de l’Art Poétique", Bibliothèque d'Humanisme et Renaissance - Tome LXVI-1, p.119-132, Genève, Droz, 2004.

ESTAÇO, AQUILES – STATIUS LUSITANUS, ACHILLES (1524-1581)
Notice d'Astrid Quillien
Cet humaniste, né au Portugal le 12 juin 1524, suit son père (militaire de carrière) au Brésil en 1532, mais rentre en 1536 au Portugal pour étudier les lettres. Il suit d’abord à Lisbonne les cours de João de Barros (grammairien et historien) puis, à Evora, ceux d’André de Resende (érudit latiniste); dans les années 1540, il se trouve sans doute à Coimbra, et étudie avec Martín de Azpilcueta Navarro (espagnol, spécialiste de droit canon). Estaço vient ensuite à Louvain, où il publie à 23 ans sa première œuvre, les Syluulae duae. Quibus adiuncta sunt praefatio in Topica Ciceronis et Oratio quodlubetica eiusdem (1547)  et où il suit les leçons de Pieter Nanninck - qui portent notamment sur l’Art poétique d’Horace. Il se rend à Paris en 1549 : il y étudie la théologie, le grec, l’hébreu, et retourne ensuite (1550) à Louvain et Anvers, où il édite plusieurs œuvres de Cicéron ainsi que son commentaire sur l’Art poétique d’Horace (1553). Il arrive en Italie, à Padoue, vers 1555: il rencontre des cardinaux et des érudits célèbres comme Marc-Antoine Muret, Paul Manuce, Carlo Sigonio et Francesco Robortello. En 1559, il s’installe à Rome comme secrétaire de la bibliothèque de Guido Ascanio Sforza. Dans un poème de 1565, Estaço décrit son réseau amical: il mentionne Francesco de Torres, Fulvio Orsini et de nombreux autres érudits du cercle Farnèse, qui fréquentent la bibliothèque du Vatican et le cardinal bibliothécaire Guglielmo Sirleto (comme Denis Lambin ou Gabriele Faerno). J. Ijsewijn note également que le savant portugais avait des amis communs avec Joachim Du Bellay (Basilio Zanchi et Laurentius Gambara). En 1565, le roi du Portugal le rappelle, mais Estaço reste à Rome où il étudie et édite les Pères de l’Eglise; il publie également des éditions de Catulle (1566), Tibulle (1567) et Suétone (1567 et 1574). Il meurt le 17 septembre 1581 à Rome; il laisse sa riche bibliothèque à disposition de ses étudiants: c’est le noyau de l’actuelle bibliothèque vallicelliane (Rome).

Sources principales pour la biographie: notice d’Isabella Iannuzzi dans le Dizionario Biografico degli Italiani - Volume 94, 2019; Manuel Mañas Núñez, « Los comentarios de Aquiles Estacio al Ars Poetica de Horacio », Ágora. Estudos Clássicos em Debate 17.1, 2015.

Oeuvres d’Estaço :
Achillis Statii Lusitani Syluulae Duae. Quibus adiuncta sunt, Praefatio in Topica Ciceronis, & oratio Quodlubetica eiusdem. Nunc primum in lucem aedita. Louanii, Iacobus Batius, 1547.
M.T. Cic. ad Trebatium Iuresconsultum Topica. In eadem Barth. Latoni ennarrationes, Ph. Melancthonis, et Ch. Hegendorphini scholia, Ant. Goueani Commentarius. Quibus additum est Achillis Statii Lusitani ad aliorum commentationes epitoma, Parisiis, Thomas Richardus, 1549.
Achillis Statii Lusitani Sylvae aliquot, una cum duobus hymnis Callimachi, eodem carminis genere ab eo latine redditis, Parisiis, apud T. Richardum, 1549 (contient l’Encomium Petrii Nannii Alcmariani).
Typi epistolici, siue figurae epistolarum, autore incerto. Interprete uero Achille Statio Lusitano. Eadem de re quaedam ex Basilio Magno, Libannii Sophistae commentariolum, quaedam ex Tatiano, ex Demetrio Phalereo, ex Cicerone, ex Philippo Beroaldo, ex Sulpitio Virulano: Eodem interprete et collectore, Lovanii, Ex officina Bartholomaei Gravis, 1551.
Commentarii in librum Ciceronis de Fato..., Lovanii, Servatii Sarseni, 1551.
M.T. Ciceronis De optimo genere oratorum liber [...] in eundem commentarii, Lutetiae, apud Vasconsanum, 1551.
Castigationes ac explanationes in Topica M. Tullij Ciceronis, Lovanii, vidua Arn. Birckmanii, 1552.
M.T. Ciceronis De optimo genere oratorum liber [...] in eundem commentarii, Lovanii, Arn. Birckmanius, 1552.
Appendiculae Explanationum [...] in Libros Tres M. Tullii Ciceronis De optimo genere oratorum Topica. De fato atque observationes rerum aliarum, Antuerpiae, Martinus Nutius, 1553.
Achillis Statii Lusitani in Q. Horatii Flacci poeticam commentarii, Antverpiae, apud Martinum Nutium, 1553. version numérisée.
Appendiculae explanationum Achillis Statii,... in libros tres M. Tullii Ciceronis de Optimo genere oratorum, Topica, de Fato, atque obseruationes rerum aliarum, Antverpiae, impensis M. Nutii, 1553.
Ad Pium IIII, pont. max. Sebastiani I. Portugalliae, Algarbiorum etc., regis nomine, obedientiam praestante Laurentio Pirez de Tauora, oratio habita ab Achille Statio,13 cal. jun. anno salutis 1560.
Catullus, cum commentario Achillis Statii, Venetiis, in aedibus Manutianis, 1566.
Hipparchi Bythini in Arati et Eudoxi phaenomena libri III. Eiusdem liber de Asterismorum. Achillis Statii in Arati phaenomena. Arati uita, et fragmenta aliorum ueterum in eius poema
, Florence, Giunta, 1567.
Tibullus, cum commentario Achillis Statii, Venetiis, in aedibus Manutianis, 1567.
Suetonii Tranquilli Libri II de inlustribus grammaticis et claris rhetoribus, cum Achillis Statii commentatione, falso nuper Lugduni Joannis Baptistae Egnati nomine inscripta atque edita, Lutetiae, apud F. Morellum, 1567.
Inlustrium uirorum ut exstant in Vrbe expressi uultus, Romae, A. Lafreri, 1569.
Suetonii Tranquilli Libri II de inlustribus grammaticis et claris rhetoribus, Antverpiae, 1574.
De redditibus ecclesiasticis qui beneficiis et pensionibus continentur commentarioli duo, Romae, apud heredes Antonii Bladii, 1575.
Orationes nonnullorum Graeciae Patrum ex Bibliotheca Achillis Statii Lusitani depromptae eodem interprete, Romae, excudebat Franciscus Zanettus, 1578.
Beati Anastasi monachi Montis Synai oratio de Sacra synaxi
, Romae, apud heredes Antonii Bladii Impressores Camerales, 1579. (traduction d’Estaço).
Achillis Statii,... de Reditibus ecclesiasticis, qui beneficiis et pensionibus continentur, commentarioli II, Romae, apud haeredes A. Bladii, 1581.
Oratio habita ab Achille Statio,... in pleno consistorio ad Pium V, pont max... F. Jo. Valletae actotius ordinis S. Jo. Hierosolymitani nomine... - Responsio... II. Antonii Florabelli, episcopi Lauellini... Pio V, pont-max nomine, Romae, apud Julium Bolanum de Accoltis, (s. d.).

Sources secondaires :
Almeida Martínez, R., Comentario de Achilles Statius a Tibulo (Libro I). Edición, traducción y estudio, Universidad de Murcia, Murcia, 2005.
Costa Ramalho A., « Notas sobre a formação de Aquiles Estaço », Biblos 54, 1978, p. 239–252.
Fernandes Pereira, B., As orações de obediência de Aquiles Estaço, Coimbra, Instituto Nacional de Investagação Científica, Centro de Estudos Clássicos e Humanísticos da Universidade de Coimbra, 1991.
Fernándes Pereira, B., « A livraria de Aquiles Estaço, Librorum venator et hellvo », Humanitas, XLV, 1993, p. 255-305.
Figueiredo Martins, I., Bibliografia do Humanismo em Portugal no Século XVI , Coimbra, 1986, p.156–157.
Formica P. - Rosa M. T., « Contributo per una ricostruzione della biblioteca manoscrita di Achille Stazio », Accademie e Biblioteche d’Italia 54, 1987, p. 5-13.
Formica, P., « Ancora sulla biblioteca manoscritta di Stazio », Accademie e Biblioteche d’Italia 57.2, 1989, p. 5-14.
Gomes Branco, J ., « Un umanista portoghese in Italia: Achilles Estaço », Relazioni storiche fra l’Italia e il Portogallo, Rome, 1940, p.135-148.
Gomes Branco, J., « A propósito da primeira obra de Achilles Statius Lusitanus », Humanitas, II, Coimbra, 1948-1949, p. 81-92.
Gomes Branco, J., « Uma comemoração de Achilles Statius Lusitanus », Humanitas, II, Coimbra, 1948-1949, p. 403-412.
Guzmán Almagro, A., « A Portuguese Contribution to 16th Century Roman Antiquarianism: The Case of Aquiles Estaço (1524–1581) », Portuguese Humanism and the Republic of Letters, Leiden, Brill, 2012.
Guzmán Almagro A., « Un poema laudatorio de Aquiles Estaço a varios humanistas », Humanitas 54, 2002, p. 319–331.
Hispanorum Index Scriptorum Latinorum Medii Posterisque Aevi. Autores Latinos Peninsulares da época dos descobrimentos (1350–1560), Lisbonne, 1993, 35, p.127-133
Ijsewijn, J., « Achilles Statius, a Portuguese Latin poet in late 16th century Rome », Humanismo português na época dos descobrimentos. Congresso Internacional, Coimbra, 9 a 12 de Outubro de 1991, Actas, Coimbra, 1993, p.109-123.
 I libri di Achille Stazio alle origini della Biblioteca Vallicelliana, a cura di Maria Teresa Rosa Corsini. Roma, De Luca, 1995.
Ijsewijn, J., « Patrus Nannius and Aquiles Statius », Humanistica Lovaniensia, 43, 1994, p. 288-294.
Leite de Vasconcelos, J., « Papéis de Aquiles Estaço », Petrus Nonius 3, 1940, p. 153-170.
Mañas Núñez, M., « Los comentarios de Aquiles Estacio al Ars Poetica de Horacio », Agora, Estudos clássicos em debate, 17/1, 2015, p.147-174, article en ligne.
Moreira de Sá, A., Manuscritos e obras impressas de Aquiles Estaço, Arquivo de Bibliografía Portuguesa 3, Lisbon, 1957, p.167–168.
Pighi, G. B., « Achillis Statii Lusitani (xvie s.) lectiones atque emendationes Catullianae », Humanitas, III, Coimbra, 1950, p. 37-160.
Pinto de Castro, A., « Aquiles Estaço, o primeiro comentador peninsular da Arte Poética  de Horácio », Arquivos do Centro Cultural Portugés, X, 1976, p. 83-102.
Tella Bartoli, M., « A proposito di Aquiles Estaço e dei Carmina del codice Vallicelliano B.106 », Annali dell’ Istituto Universario Orientale. Sezione Romana 17, 1975, p. 293-362.
Ullman, B., L., The Identification of the Manuscripts of Catullus cited in Statius’ Edition of 1566, Chicago, Press of the H.G. Adair Print. Co., 1908.
Ullman, B., L., « Achilles Statius Manuscripts of Tibullus », Studies in the Italian Renaissance, Rome, 1973, p. 429-449.


FABRICIUS, GEORG (Chemnitz 1516-Meissen 1571)
Notice de Nathalie Dauvois
Georg Fabricius, 1516-151, poète latin et philologue, historien et archéologue, éditeur de Térence, Virgile et Horace, dirigea pendant 25 ans le collège de Meissen.  G. Fabricius fit ses études à Leipzig, il devint précepteur des frères Werthern et accompagna le plus âgé d'entre eux, Wolfgang, en Italie à partir de 1539 : ils séjournèrent d'abord à Padoue, puis à Ferrare, Bologne, Florence, Rome et Naples avant de revenir en Allemagne en 1543. Il publia en 1547 les différentes étapes de son voyage en Italie sous forme de lettres en vers, lettres datées de 1543-1544. Il publie aussi le résultat de son étude des antiquités de Rome en 1549, notamment une sélection d'inscriptions qui ont trait aux textes de loi ce qui constitue un moment important de l'histoire de l'épigraphie, mais aussi de la philologie juridique. Il devient en 1546 recteur du collège de Meissen, fonction qu'il occupe jusqu'à sa mort en 1571. Il a publié des éditions de Térence (1548), Virgile (1551), Horace (1555, 1571): Il commença par une édition d'Horace qui compilait différents commentaires, celle de Bâle, 1555 que  nous proposons ici, puis donna sa propre édition à Leipzig en 1571. Protestant, Fabricius connut Sturm et Melanchton. Il publia deux livres d'Hymnes en 1553, réédités en 1560 et 1567 sous le titre Poematum sacrorum libri. Sa confession lui valut de voir son édition d'Horace mise à l'index à Rome en 1557 et l'ensemble de son œuvre en 1559.

G. Fabricii... Itinerum liber unus, Leipzig, 1547, nouvelle éd. Bâle, 1560
Antiquitatis aliquot monumenta insignia, Strasbourg, 1549.
Roma, liber ad opt. Autorum lectionem apprime utilis ac necessarius, ejusdem itinerum liber unus, Bâle, 1551.
De syntaxi partium orationum apud graecos liber, G. Morel, 1551
Poetarum veterum ecclesiasticorum opera christiana, 1562
De re poetica libri septem, 1565
Horatii Flacci Poemata, illustrata argumnentis et castigationibus G. Fabricii Chemnicensis, cum indice adagiorum, Leipzig, J. Steinman, 1571.
D. J. Schreber, Vita clarissimi viri Georgii Fabricii chemnicensis, Lepizig, 1717.
Neue Deusche Biographie,  Berlin, 1953-2001, IV, 734-735.
L'Europe des humanistes, 177.
Sandys, S.E., An History of classical Scholarship, Cambridge, 1908, II, 268
Nouvelle Biographie Universelle, 16, 958
Schäfer, E., Deutscher Horaz. Conrad Celtis, Georg Fabricius, Paul Melissus, Jacob Balde. Die Nachwirkung des Horaz in der neulateinischen Dichtung Deutschland. Wiesbaden, 1976.

GLAREANUS, HENRICUS - GLAREAN, HEINRICH LORITI (1488-1563)
Notice de Nathalie Dauvois
Né près de Glarus en Suisse, H. Loriti est  en général connu sous son patronyme latin. Il reçut une éducation à la fois rhétorique et musicale à Württemberg, puis à Cologne où il devint en 1512 poeta laureatus. Il se lia avec Zwingli.
Glareanus vint à Bâle en 1514 il y rencontra Erasme, Froben, B. Rhenanus. Il occupe les fonctions de directeur de collège à Bâle (1514-7), puis à Paris (1517-22) puis à nouveau Bâle et enfin Fribourg. Glareanus se consacre aux commentaires des ouvrages de la littérature classique : en histoire, mathématique et musique : Salluste, Tacite, Tite-Live, Denys d'Halicarnasse, Horace, Ovide, César...
Ses théories musicales font beaucoup pour sa réputation. Il publie en 1516 l'Isagoge in musicen et en 1547, le Dodecachordon traité de théorie musicale, où il retrace l’histoire  de la musique et invente un système musical fondé sur douze modes.
Glareanus publie sa première édition des œuvres d’Horace en 1533 en même temps que ses Annotationes in Q. Horatium Flaccum et dédicace les deux textes à J. Fabri, archevêque de Vienne. Ses Annotationes sont remarquables par leur approche critique de la tradition antérieure du commentaire d’Horace, qu’il s’agisse de sa comparaison des commentaires d’Acron et Porphyrion, toujours en faveur de Porphyrion, commentateur le plus ancien et le plus exact selon lui, ou de ses critiques des commentaires de Landino ou de Mancinelli. Il accuse notamment Landino d’incurie et de négligence et Mancinelli, qui cite volontiers ses propres commentaires ou poèmes, d’ambition. Claudia Wiener a montré dans son étude des Annotationes et de l’exemplaire de l’édition (Venise, 1486) des œuvres d’Horace annoté par Glareanus, qu’il n’y révisait pas le texte, mais en commentait les commentaires. Ses Annotationes reprennent avec plus de modération certaines de ces notes pour les rectifier. Glareanus donnerait ainsi à ses élèves, par cette démarche critique, une leçon de philologie. La conservation de plusieurs cahiers d’élèves de Glareanus qui ont bénéficié là aussi d’une étude permettent de prendre la mesure de cette dimension pédagogique de la philologie critique de Glareanus.

Contemporaries of Erasmus, vol. 2, p. 105-108.
Der Humanist Henrich Loriti genannt Glarean 1488-1561, verfasst von R. Aschmann et alii, Glaris, 1983.
I. M. Groote et B. Kölbl « Glarean the professor and his students books », BHR, LXXIII-1, 2011.
E. Lichtenhaln, « « Ars perfecta » zu Glareans Auffassung der Musikgeschichte » in Festschrift A. Geering , Bern, 1972, 129-138.
J.-C. Margolin, « Un échange de correspondance humaniste à la veille de la réforme. Henri Glaréan-Oswald Myconius (1517-1524), in La correspondance d'Erasme et l'épistolographie humaniste, Bruxelles, 1985, p. 145-181.
H. Schreiber, H. Loriti Glareanus, seine Freunde und seine Zeit, Friburg, 1837.
Claudia Wiener, « Glarean’s didactic approach to Horace, and his critical review of classical and modern commentaries », in Heinrich Glarean's Books: The Intellectual World of a Sixteenth-Century Musical Humanist, éd. Iain Fenlon, Inga Mai Groote, Cambridge University Press, 2013, p. 223-247.


GRIFOLI (GRIFFOLI), JACOPO - GRIFOLUS LUCINIANENSIS, IACOBUS
Notice de Monique Bouquet
On sait peu de choses sur Jacopo Grifoli,dont on ignore les dates de naissance et de mort, les témoignages de ses contemporains constituant la source la plus fructueuse ; issu d’une famille installée à Lucignano à partir de 1426, il serait né tout près de Sienne. On sait, par des lettres élogieuses de Bartolomeo Ricci et de Paolo Minuzio, qu’il fut sollicité pour remplacer Egnazio à Venise, puis réclamé par l’université de Bologne, avant d’être élu pour trois ans comme professeur d’éloquence à Vicenza, en 1542. Il serait ensuite allé à Pérouse, comme professeur de belles lettres et de langue grecque, avant de retourner à Vicenza en 1556 où il fut élu pour trois ans et reconduit pour trois autres années, en 1559.
Cet humaniste, philologue, maîtrisant bien le grec, a traduit en latin les Olynthiennes ainsi que deux des Philippiques de Démosthène (Florence,1550), prononcé et publié plusieurs discours (leçons d’ouverture ou discours d’éloge) dont celui à la gloire de Côme de Médicis (Florence,1565). Mais il est surtout connu pour son commentaire à l’Art poétique d’Horace publié conjointement avec celui à la Rhétorique à Hérennius attribuée à Cicéron (en 1550 à Florence, 1552 à Paris, et 1555 à Bâle dans les Opera Horatii, chez Henricus Petrus). C’est en sa qualité de commentateur du poème horatien et de sa connaissance de la Poétique d’Aristote, qu’il figure aux côtés d’auteurs de poétiques ou commentateurs d’Aristote et d’Horace, dans l’Occhiale Stritolato d’Angelico Aprosio Ventimiglia, et qu’il fait l’objet d’un éloge appuyé de Pier Vetttori dans une lettre adressée à Sallustius Piccolomini, à qui Vettori demande de faire hâter la mise sous presse du commentaire à l’Art Poétique qu’il vient de lire.
Grifoli s’était fait connaître préalablement à l’occasion de la querelle cicéronienne, par ses « défenses » de Cicéron publiées en 1546, dans lesquelles il ripostait à l’anti-cicéronien Celio Calcagnini, qui dénonçait tout particulièrement les imperfections stylistiques de Cicéron, dans une préface à l’édition du De officiis publiée à Bâle, en 1538. Une seconde controverse l’opposa à Giasone Denores, son condisciple auprès de Trifone Gabriele, à qui il répondit, très fermement et point par point, dans la réédition de son commentaire à l’Art poétique d’Horace en 1562, à Venise.
 
Œuvres de Grifoli :
M. Tullii Ciceronis defensiones contra Caelii Calcagnini disquisitiones in ejus Officia, per Jacobum Grifolum,  Venetiis, apud Aldi filios, 1546.
Demosthenis Orationes tres olynthiacae; et prima, et secunda contra Philippum, interposita ea, quae idem scripsit de pace, in latinum ab Iacobo Grifolo Lucinianensi conuersae. Xenophontis rhethoris Hieron, vel Tyrannicus ab eodem conuersus, Florentiae, in aedibus Laur. Torr., sexto calend. Nouemb. 1550.
Q. Horatii Flacci liber de Arte poetica Iacobi Grifoli Lucinianensis interpretatione explicatus. Rhetoricos libros ad Herennium, ad Tullium Ciceronem nihil omnino pertinere per eundem declaratur, Florentiae, 1550. version numérisée
Q. Horatii Flacci liber de Arte poetica, Jacobi Grifoli,... interpretatione explicatus. Nunc primum post Florentinam aeditionem Lutetiae impressus, Paris, ex typographia M. Davidis, 1552.
Horatiani hujus voluminis tomus alter […] Franciscus Luisinus Utinensis in Artem poëticam. Jacobus Grifolius Lucinianensis in Artem poëticam. Jason de Nores Cyprius in Artem poëticam… Basileae, apud Henrichum Petri, 1555.
Iacobi Grifoli Lucinianensis Orationes variae variis in locis habitae, Venetiis, 1557.
Iacobi Grifoli Lucinianensis Oratio de vera gloria. Habita Vicentiae ab Antonio Valmariano Io. Aloysii f., Venetiis, apud Cominum de Tridino Montisferrati, 1561.
Q. Horatii Flacci liber de Arte poetica Iacobi Grifoli Lucinianensis interpretatione explicatus, & nuper recognitus, defensis locis omnibus, quos temere Iason de Nores improbauerat. Rhetoricos libros ad Herennium, ad Tullium Ciceronem nihil omnino pertinere per eundem declaratur, Venetiis, apud Ioannem Variscum, et socios, 1562. version numérisée
De laudibus Cosmi Medicis illustrissimi Florentiae Senarumque ducis. Oratio Iacobi Grifoli Lucinianensis, Florentiae, apud filios Laurentii Torrentini, & sociorum, 1565.
Sources contemporaines de Grifoli :
Manuzio, Paolo, Tre libri de lettere volgari, Venetia, 1556, lib. II, p. 47-48.
Ricci, Bartolomeo, Bartholomaei Ricii Lugiensis epistolarum libri VIII, Bononiae, 1560, p. 54-56.
Ventimiglia, Angelico Aprosio, L’Occhiale Stritolato, Venezia, presso Taddeo Pavoni, 1641, p. 200.
Vettori, Pier, Petri Victorii epistolarum libri decem, Florentiae, apud Iuntas, 1586, p. 40.
Sources secondes :
de Angelis, Luigi, Biografia degli scrittori sanesi, Siena, 1824, p. 349-350.
Grimaldi, Anna Maria, “L'arte poetica nei commenti et nelle traduzione del cinquecento”, Orazio e la letteratura italiana. Contributi alla storia della fortuna del poeta latino, Rome, 1994, p. 53-88.
Millet, Olivier, “Poétique, rhétorique et allégorie : les interprétations de la chimère horatienne (Art Poétique,vers 1-13)”, Camenae n° 13, 2012.
Salvi, Ignazio, Memorie antiche e moderne intorno alle pubbliche scuole in Vicenza, Vincenza,1815, p. 59-60; 72-74.
Vermiglioli, Giovanni Battista, Biografia degli scrittori perugini, Perugia, presso Bartelli e Constantini, 1829, p. 245.
Weinberg, Bernard, A history of literary criticism in the Italian Renaissance, 2 vol., Chicago, University of Chicago Press, 1961.

Index des commentateurs L-Z

 

mise à jour le 29 novembre 2021


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