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Hamonet / Promenade au Cap Fréhel avec Léon Hamonet (Blandine JENNER)

Notice

 

Léon Hamonet, La Fauconnière au Cap Fréhel, non daté,
Aquarelle sur papier, 21cm x 31cm, coll. particulière.


Source de l'image

 

À l’instar de Huysmans, intéressons-nous, dans ce compte rendu, aux délaissés de nos musées. Léon Hamonet est un peintre breton, né sur la côte d’Emeraude dans le port d’Erquy en 1877, et mort à Rennes en 1953. Malgré la profusion de ses œuvres, il est peu exposé. Sa mémoire est cependant gardée par l’Association Léon Hamonet. L’artiste a peint inlassablement la Bretagne de 1909 à sa mort, usant d’aquarelles, de fusains, de peintures à huile etc. Parcourant la côte d’Emeraude, il l’a immortalisée dans un style très personnel, que l’on peut cependant rapprocher de la stylisation de Pont Aven. Il a également peint quelques visages, pleins d’humour, qui relèvent d’un grand sens de l’observation et de la recherche du pittoresque. Il a aussi laissé des portraits de sa famille: de sa femme Anna L’Hévéder, épousée en 1910, et ses deux enfants Henry et Suzanne.

La plupart de ses œuvres ne sont pas datées et les tableaux appartiennent à des collections privées. On peut trouver La Fauconnière au Cap Fréhel (21x31cm, coll. particulière) sur le site de l’association.


Compte rendu (janvier 2021)

On peut remercier M. Hamonet pour ces toiles très douces sur un pays très doux. Beaucoup de ces aquarelles de la côte d’Emeraude seraient à retenir; mais pour bien parler d’une peinture, il faut avoir été, un tant soit peu, appelé par la toile. Que cela soit la composition ou le dessin, elle doit vous être particulière, même si ce n’est que sur un seul détail. Nulle peinture n’est muette. Elle parle simplement son propre langage, que l’on comprend ou non. Ainsi, je ne décrirais ici que ce qui a touché ma mémoire. Un même détail, qui frappe dans le paysage comme dans la peinture. Je ne me souviens que d’une étrange nostalgie. Je connais cette place perdue dans la brume. Il y fait aussi froid dans mes souvenirs que sur la toile.

Imaginez. C’est le petit matin. Non pas un matin doré au soleil saignant sur l’eau, non. C’est un petit matin, un matin gris, frais, pur, lavé des pluies de la nuit. Presque trop propre et presque trop clair. La mer est calme, bleue, lisse. C’est un temps idéal, allons-nous promener sur la côte. Imaginez un paysage glacé où s’épanouissent quelques bouquets de bruyères sèches. On longe la mer. Ici, le sentier fait une courbe, arrêtons-nous un instant. On se fige. On contemple. On entend les mouettes portées par le vent au-dessus d’un rocher solitaire. Imaginez un bloc de granite isolé et blanchi, détaché de la côte, dressé seul dans la mer, et où nichent les oiseaux. L’océan l’entoure. Un château dans le lointain est scellé dans la brume. L’eau est à peine agitée, le tableau entier s’est figé: tout semble suspendu. Il n’y a que l’air; l’air qui passe au travers de la toile. On sent comme une bourrasque fraîche filée sur sa joue; et ce vent apporte avec lui à la fois les cris des mouettes et l’odeur salée de l’océan.

Ici, Léon Hamonet n’a pas peint la vie, il a peint l’air du large. Si sa mer est immobile, c’est parce que le vent souffle sur les spectateurs. Si sa peinture est froide et grise, c’est parce que la mélancolie est passée de l’infini de la mer à l’œil du spectateur.

Voilà une bien fidèle aquarelle. Car ce n’est pas l’image que ce peintre a saisie, c’est l’impression. Celle que j’avais quand j’ai remarqué ce rocher solitaire perché sur ce bord de mer, et dont je me suis souvenu devant cette peinture figée. Celle dont vous vous souviendrez aussi, peut-être, devant ce morceau de Bretagne.

Un jour j’irai la voir, cette aquarelle, je me ferai emporter par la toile: à travers ses douces couleurs, je retrouverai la douceur du pays.  


mise à jour le 3 février 2021


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