Organisation : Isabelle Leblic et Cécile Leguy (Lacito) ; Luca Greco (université de Lorraine)

Présentation :

L’avenir est par définition toujours inconnu ; ce sont plus précisément les situations de crise, les “ratés” communicationnels, les changements qui nous mettent à l’épreuve de l’inattendu en rendant suspect l’accord tacite sur lequel tentent de s’organiser nos vies ordinaires (Wittgenstein 1965, Dewey 2014, Boltanski 2009). Les situations de crise, que ce soit du point de vue personnel ou social, cosmologique quand notre environnement lui-même semble se dérégler, nous conduisent à éprouver l’incertitude comme perte du contrôle à différentes échelles. Elle trouble les habitudes et ébranle les convictions ; cette expérience, intime ou partagée, invite à envisager de nouvelles réponses, à imaginer de nouvelles manières de retrouver du sens.

Nous examinerons cette confrontation entre épreuve de la perte des certitudes et imagination à partir d’une approche en anthropologie linguistique tenant compte des relations entre expression langagière et expérience corporelle (Duranti 2010, Ochs 2012, Throop 2012). Nous verrons comment la mise en expérience collective, multisémiotique et temporelle de l’imagination d’un événement possible, futur et incertain peut à la fois être codée dans les pratiques langagières et construite dans l’interaction grâce à la mobilisation d’un répertoire multisémiotique riche, au sein d’une pluralité de chronotopes imbriqués et de formats de participation spécifiques.

La discussion donnera l’occasion d’explorer la façon dont les participants à une interaction font preuve de créativité dans l’imbrication de plusieurs spatiotemporalités, de réflexivité dans l’analyse et la projection d’une situation à venir.

La journée permettra de poser les jalons pour une poétique et une politique du futur et du possible et d’interroger ses conséquences pour une anthropologie linguistique de l’imagination ancrée dans l’expérience des sujets.