À l’occasion du tricentenaire de la mort de Charles Dufresny (1648-1724) et de la publication de son théâtre complet chez Classiques Garnier, ce colloque a pour but de redonner de la visibilité à ce dramaturge-compositeur polygraphe : un « dilettante professionnel », si l’on peut oser l’oxymore, qui exerça ses nombreux talents avec distinction toujours, parfois avec succès, mais sans ambition de faire carrière. Réputé « cousin du roi », très en vue dans les milieux artistiques et culturels, Dufresny fut aussi journaliste et directeur du Mercure galant, concepteur de jardins, compositeur de chansons, inventeur putatif de l’art du collage, ainsi que moraliste avec ses Amusements sérieux et comiques (précurseurs, entre autres, des Lettres persanes).
Dufresny fait partie de ces auteurs tombés dans les oubliettes de l’histoire, qui ont écrit à l’ombre de Molière, et avant l’avènement de Marivaux, à la fin d’un règne solaire en passe de décliner. Il se forge une réputation à la Comédie-Italienne et à la Comédie-Française, en n’écrivant plus que pour cette dernière après l’exclusion des Italiens en 1697, tout en cultivant la verve acquise au contact des comédiens ultramontains. Son théâtre, traduit, s’exporte à travers toute l’Europe. On joue et on chante Dufresny en Italie, en Allemagne, en Angleterre, en Hollande, en Pologne. Dessinateur des jardins du roi, il en ruine la belle symétrie et invente le jardin à l’anglaise. De façon analogue, il renouvelle le genre de la comédie en mettant l’opéra en abyme, en variant les registres et en mélangeant les genres. Mais Dufresny est aussi un moraliste atypique qui porte un regard désenchanté sur le mariage et plus largement sur une société en passe de basculer dans la modernité.
Dans le sillage des travaux pionniers de François Moureau qui ont fait émerger la figure de Dufresny, ce colloque sera le premier à être consacré à ce « singulier moderne ». Il se propose de réunir des historiens du théâtre, de la littérature, de la musique, de la chanson et de la presse, mais aussi de l’art des jardins et des beaux-arts, afin de renouveler et approfondir, dans une perspective résolument pluridisciplinaire, notre connaissance de cette figure polyvalente, bohème et touche-à-tout, emblématique de la transversalité des pratiques, de la circulation des matières et des manières.
D’une auctorialité à l’autre – Dufresny, ses modèles, ses contemporains, le théâtre post-moliéresque ; Dufresny et la co-écriture (avec Regnard, Brugière de Barante...) ; Dufresny inspirateur de Marivaux, Montesquieu, Beaumarchais...
Dufresny et la musique – La place des musiques de Dufresny dans le Mercure, le Recueil des airs sérieux et à boire ; chansons et chansonniers ; collaboration avec les compositeurs (Gillier, Grandval, Mouret...) ; divertissements ; danses...
Carrière polygraphique – L’auteur et les institutions (le Mercure, la Comédie-Française, la Comédie-Italienne, la Cour...) ; figures de journalistes-dramaturges (Boursault, Donneau de Visé, Subligny, Marivaux, Fuzelier...) ; Dufresny-conteur ; centralité et marginalité, dilettantisme...
Processus de création – Écrire pour la scène à l’entre-deux-siècles ; écrire pour une troupe ; dramaturgie et pratique du divertissement ; pièce bien faite, petite pièce, pièce à tiroirs ; métathéâtre ; parodie, plagiat, collage, recyclage ; dans les arts visuels, les jardins, l’écriture. Irrégularité, esthétique rococo, ordre et désordre, dramaturgie fin-de-règne...
La matérialité du spectacle – Interprètes (comédiens, chanteurs, danseurs...) ; « mise en scène » ; Comédie-Italienne versus Comédie-Française ; décors, costumes, machines, effectifs sur scène, dramaturgie visuelle...
Traces et postérité – Iconographie, frontispices, traductions ; Dufresny en Europe ; réécritures ; Dufresny personnage de théâtre (Charles Rivière Dufresny ou Le Mariage impromptu, 1798 ; Le Mariage fait et rompu de Dufresny, s.d...) ; manuscrits (de censeurs, de souffleurs...) ; éditer le théâtre de Dufresny ; les attributions douteuses... Dufresny en chiffres, au crible des registres de la Comédie-Française, de la Comédie-Italienne...
Le moralisme entre deux siècles – Les Anciens et les Modernes, cynisme, sensibilité ; Dufresny et La Bruyère ; esprit de la Régence ; portraits de mœurs (le veuvage au théâtre, les femmes, la vieillesse au théâtre, misogynie de Dufresny, la vie parisienne, le jeu, l’opéra, la mode, l’argent, le Paris de la fin du règne de Louis XIV, les paysans, les accents, l’orientalisme...) ; les aphorismes ; les formes brèves ; humour noir et rire jaune ; Les Amusements sérieux et comiques...
Le journalisme à la mode – Le Mercure de Dufresny ; les privilèges du Mercure ; ethos de journaliste ;les collaborateurs du Mercure...
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